[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Ma vie n'avait pourtant pas mal commencé dans sa petite ville de Dillon au Texas. Fils unique d'une famille soudée par la mort tragique de mes grands-parents dans un accident de voiture, la vie à la base militaire n'est pas la pire des vies. Mon père, héros à mes yeux et Marines aux yeux de l'Etat, n'avait quasiment pas vu d'autres pays que le sien, étant réserviste. Pourtant, à mes cinq ans environ, c'est-à-dire au début des années 90, la guerre du Golfe éclate et l'ONU réquisitionne le corps d'Armée auquel est rattaché mon père. Une semaine plus tard, sa mort est confirmée, c'est le début de la malchance d'Isaac Payne. Nommé au départ Arthur Jr., ma mère ne supporte pas de devoir m'appeler par le nom de son défunt mari et décide donc de me donner le nom de mon grand-père, Isaac. Quittant la base militaire, nous retournons vite à une vie civile.
J'ai désormais dix ans et bien que grandir sans son père soit extrêmement dur pour un enfant, ma mère réussit à nous mettre à manger sur la table tous les jours et j'ai un toit pour dormir toutes les nuits. Ce que l'oeil de petit garçon ne voit pas, c'est que sa propre mère le supporte de moins en moins, sa ressemblance avec son père est trop flagrante et trop douloureuse pour elle. Ses horaires l'empêchent de voir son fils grandir et malgré les réclamations du petit garçon, maman Payne fini par disparaître elle aussi, laissant Isaac à une tante quelconque qu'il n'a jamais rencontré de sa vie.
L'appréhension de vivre chez une tante vite passée, j'entame ma nouvelle vie d'une manière perplexe pour un petit garçon. Parmi les sports que me propose le collège de quartier où je vais, aucun ne me tente. Je me suis passionné à la boxe depuis un ou deux ans maintenant et même si c'est de la boxe anglaise que j'aurais aimé pratiquer, je m'attache à la boxe française, le coach devenant vite pour moi un père qui m'avait toujours été refusé jusqu'à maintenant ! Je termine mon collège sans ennui, ma pratique de la boxe aidant probablement à ce que l'on laisse le petit Payne tranquille.
L'approche, aussi approximative soit-elle, d'un quelconque avenir est toujours très difficile à prévoir. Pour moi, le choix fut très simple, je n'avais pour ainsi dire pas d'attache, ma tante n'aimant pas réellement avoir un bambin dans les pattes, j'étais souvent livré à moi-même et mon coach de boxe prenait sa retraire, laissant le gentil Payne livré à la nature sauvage du monde extérieur. Le choix fut donc très rapide et alors que bon nombre de mes camarades de classes choisissaient de devenir médecin, architecte ou avocat, je devais Marines. J'abandonnais tout espoir d'avoir un jour une vie calme, cela peut-être dû à mon adolescence, à ma vie jusque-là mouvementée. Toujours est-il qu'à dix-huit ans, je rentrais dans les corps de l'USMC et ce qu'alors que mes réels talents purent être exploité. Possédant un temps de réaction exceptionnel, je me plaçais rapidement comme le meilleur de mon régiment et deux ans plus tard, je quittais sans le savoir des Marines pour entrer dans les Black Ops, les services secrets de l'armée. Le sale boulot, c'est nous.
Durant des années, j'avais pensé servir mon pays dignement. Durant des semaines, j'ai combattu dans des pays pauvres, des pays soumis à la guerre et à la violence. Je nous pensais libérateurs, nous n'étions que des hommes assoiffés de sang, victimes de leur obsession pour la victoire. Ce que je fis là-bas ne fut jamais connu que par mon unité et par moi-même et si je n'y suis pas retourné ensuite, c'est grâce à ma femme, rencontrée dans un bar, de manière totalement innocente, en plein cœur de Manhattan. Douce et frêle, elle me redonnait espoir dans l'âme humaine. Elle vainquit les noires idées que la guerre m'avait dites un jour. Je quittais les Opérations Secrètes, jurant de ne révéler à personne ce que j'avais vu ou fait. Si seulement les choses étaient aussi simples.
Tout juste retraité de cette vie violente et disgracieuse, je rentrais dans la police local de New-York, fier de défendre à nouveau le peuple américain, mais les choses ne sont jamais ce qu'elles sont vraiment et mes vieilles manières d'agent spécial me poussèrent à croire que j'étais épié. Mes vieilles manières... Trop oubliées pour que je réagisse assez vite. Trop encroûté dans ma vie pour voir la vérité. J'avais été dupé. Ma femme, alors enceinte de jumelles, fut abattue dans mon domicile. C'était du boulot propre. Ma vie entière bascula dans le noir. A partir de ce moment, aucun souvenir n'est certain, tout n'est que brume et désespoir. Brisé, j'étais une cible facile, mais toujours trop dangereuse. C'est pourquoi je fus renvoyé chez moi par le NYPD.
Buvant pour oublier, j'oubliais peu à peu ce que j'étais, le brave homme, fier de sa nation sombra dans l'oubli pour qu'il ne reste plus que Isaac Payne, l'ivrogne. Isaac Payne, le pilier de comptoir. Dure furent ces années-là. Mes amis, qui était essentiellement ceux de ma femme, me quittèrent pour qu'un jour, il ne me reste plus que le choix de ma propre vie. Étant croyant, le suicide n'avait jamais été une option pour moi. M'interdire le Paradis à jamais ? J'étais déjà en Enfer, j'avais vu ce que l'homme a de dire à offrir. Et alors que je touchais le fond, seul dans mon coin, les portes de mon appartement cédèrent face aux assauts de mes anciens camarades, venus pour en finir avec l'ancien Black Ops que j'étais. Personne ne quitte les Black Ops vivant. Personne. Sauf moi.
Pour une obscure raison, à cette époque comme à aujourd'hui, je ne fus pas tué ce jour-là, peut-être le message était-il compris ? Peut-être savaient-ils que je ne balancerais jamais rien. L'espoir naquit en moi et je reprenais peu à peu goût à la vie. Cherchant des petits boulots, je finis par devenir garde personnel d'une riche famille anglaise. Trop tôt surement puisque je fus remercier à peine quelques mois plus tard. Mes méthodes de travailler ? Mon penchant pour la bouteille ? Mon goût pour la boxe française ? L'horreur que j'ai pour le thé, je n'en sais rien, mais me revoilà de nouveau sans emploi. De retour à New-York, je traînais souvent dans le même bar, en face de chez moi, jusqu'à ce qu'un russe qu'un jour j'avais eu le malheur d'épargner déboule, tue le patron et ruine l'endroit. Lâchant définitivement la bouteille - pour cependant y retomber quand je le peux, ma volonté pliant relativement trop souvent -, j'enseigne la boxe dans un petit club complètement perdu et recherche du travail dans la sécurité.
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