La galerie d'une russe américasinée

Un immense sentiment de vide envahit Helmett lorsqu’il poussa la porte de ce qui fut la maison de sa famille. Il était seul à présent. Il se souvint avec une certaine mélancolie du chien qu’il avait dû adopter en « adoptant » Natalia, la russe n’allant pas sans son chien. La brave bête était morte quelques années plus tôt, après avoir eu une vie bien remplie, pleine d’amour et de tendresse. La vieillesse l’avait emporté. Ils avaient tous ressenti une grande tristesse à la suite de cette disparition, et la maison semblait manquer de quelque chose. Alors que dire de ce qu’il ressentait à présent qu’il ne restait que lui ?

Il ferma les yeux, sur le pas de la porte. Il revoyait le pilote qui perdait le contrôle de l’hélicoptère, la chute, l’explosion. Seul lui avait survécu après avoir été projeté à quelques mètres, grâce à son « don ». Sa foutue mutation. Il entra dans le salon vide et plongé dans la pénombre. Il revoyait Jenna jouant avec les GI Joe de son frère, ce dernier la surveillant du coin de l’œil tout en regardant la télévision. Natalia abandonnait la cuisine – ou tout ce qu’elle faisait – pour venir l’embrassait tendit qu’il grognait. Personne ne vint l’accueillir.

Helmett continua. Il se sentit perdu lorsqu’il ne vit pas sa fille dormir tranquillement dans ses couvertures, ou son fils, sursautant, pris en train de lire ou, plus souvent, d’écrire. Ses yeux verts pétillaient en voyant qu’il ne s’agissait « que » de son père. Il se levait sur la pointe des pieds pour enlacer le ‘‘Tyran’’ et lui souhaiter bonne nuit. Un sourire tendre naquit sur ses lèvres à ce souvenir, et ses yeux s’embuèrent.

Ce fut pire lorsqu’il ouvrit la porte de sa chambre. Natalia ne l’attendait pas, allongée nonchalamment sous un fin drap recouvrant son corps nu. Elle ne lui jetterait plus de regards pétillant en se mordant la lèvre, elle ne l’embrasserait plus jusqu’à ce qu’il réponde à ses désirs, ni ne l’enlacerait lorsqu’ils étaient fatigués. Elle ne lui volerait plus l’un de ses T-shirts pour s’en servir de pyjama. Elle ne lui crierait plus dessus, elle ne le prendrait plus dans ses bras, elle ne le contredirait plus, il ne la protègerait plus. Il avait échoué. Elle ne l’aimerait plus. Elle ne l’aimerait plus, pour la bonne raison qu’elle était morte. Ils étaient tous mort. Jenna. Zinoviy. Natalia… Et leur corps qu’il avait souvent tenu entre ses bras, serré contre torse, n’étaient plus que cendres ou cadavres brûlés.

Helmett avait beau être fort, voir même froid et distant, il ne put retenir ses larmes. Lui qui avait enfin une famille à aimer et protéger, lui qui avait enfin touché au bonheur, il venait à nouveau de tout perdre. Il y avait d’abord eu son oncle et sa tante. Puis son père, sa mère. Sa cousine, qui l’avait abandonné et sur laquelle il avait tiré un trait. Et à présent, il perdait sa femme et ses enfants…

Tout ça, c’était de la faute de la russe. C’était elle qui l’avait séduite ! Non… C’était faux. C’est lui qui avait cédé. Lui qui était devenu faible. Il avait laissé Natalia construire leur bonheur et s’était fragilisé. Jamais il n’aurait dû succomber ; l’amour, ce n’était pas pour lui… Il en avait la preuve. Mais comment regretter ce bonheur passé ? Il avait été heureux… Helmett avait toujours envisagé qu’un jour il puisse « partir » plus tôt que prévu, à cause de leur métier dangereux. C’est pour cela qu’il avait voulu que Natalia reste à la base et ne soit plus un agent de terrain. Il avait peur de la perdre. Puis Zinoviy. Puis Jenna. Il avait accepté de pouvoir mourir avant l’heure, mais jamais il n’avait imaginé qu’ils puissent mourir, eux, et survivre, lui. Il pensait sentir tout le poids de l’injustice peser sur ses épaules. Il ne méritait pas de vivre, mais Natalia le tuerai s’il lui prenait l’envie de se suicider, où qu’elle soit. Non… Helmett allait à nouveau fermer son cœur, et le sceller à jamais dans le souvenir de ce bonheur fugace. Et le Tyran renaîtrait de ses cendres, plus cruel et plus fort que jamais.

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Fin alternative :

Helmett avait beau être fort, voir même froid et distant, il ne put retenir ses larmes. Lui qui avait enfin une famille à aimer et protéger, lui qui avait enfin touché au bonheur, il venait à nouveau de tout perdre. Il y avait d’abord eu son oncle et sa tante. Puis son père, sa mère. Sa cousine, qui l’avait abandonné et sur laquelle il avait tiré un trait. Et à présent, il perdait sa femme et ses enfants…

Helmett s’allongea sur le matelas, trop grand et trop froid. Il attrapa le T-shirt qu’avait porté Natalia cette nuit-là, et le pressa contre son visage mouillé. Il laissa les souvenirs le submerger, se souvenant de sa rencontre avec la russe. L’insupportable agente qui lui résistait encore et toujours et qui ne partait jamais. L’amitié qu’il avait commencé à avoir pour elle, rapidement transformé en attirance parce qu’il ne voulait pas admettre qu’il l’aimait. Les efforts de la brune pour être plus supportable, et surtout pour le séduire. Et elle avait réussi. Ils avaient eu un premier enfant. Enfant accidentel qui avait complètement chamboulé sa vie, déjà que Natalia l’avait troublée. Et puis le bonheur, le bonheur malgré toutes leurs disputes et réconciliation. Pas le moindre écart de conduite, juste deux caractère de feu qui se confrontait régulièrement pour finir au creux des bras l’un de l’autre. Le bonheur qui a fait naître un deuxième enfant. Encore plus de bonheur. Le visage rayonnant d’une femme et de deux enfants. Sa famille.

L’agent eu soudainement envie de rire. Rire pour honorer tous ces souvenirs. Mais il s’étouffa rapidement, avant de pleurer de plus belle. Il avait l’impression de devenir fou. Et surtout, il ne voulait plus vivre. Il ne pouvait concevoir un futur sans Natalia. Sans Zinoviy et Jenna. La russe aurait tout fait pour l’empêcher de se suicider. Et elle aurait réussi. Mais elle était elle-même morte… Il voulait juste la rejoindre, quitter ce monde soudainement trop fade.

Il se leva. Lentement. Sûrement. Résigné. Il ne pensait plus qu’à la famille qu’il avait perdue. Il chercha son couteau – celui que Natalia lui avait offert pour leur premier Noël. Il était magnifique. Il l’avait toujours aimé, et c’est peut-être bien ce jour-là qu’il avait pris conscience qu’il l’aimait vraiment. Sur la lame, elle avait fait graver le prénom de l’agent et le signe de l’infini. L’infini. C’est là qu’il la rejoindrait. Helmett rejoignit la salle de bain. D’un geste expert, il se donna quitta la vie. Rapidement. En regardant la mort droit dans les yeux…