Les rayons du soleil avaient réussi à se faufiler au travers des persiennes, et venait chatouiller le visage du jeune homme qui somnolait tranquillement. Un bras en travers du corps de son compagnon, la tête posée sur son torse, il savoura quelques instants encore cette situation plus que confortable avant de se décider à bouger un peu. Il se redressa doucement et posa son regard sur Neil en se demande si celui-ci dormait toujours, où s’il faisait semblant. Après un rapide baisé déposé sur ses lèvres, Caolan acheva de s’asseoir sur le bord du lit et s’étira. L’archéologue étouffa un bâillement en se grattant la nuque et se donna une petite baffe pour se réveiller.
Une nouvelle journée bien remplie s’annonçait ! Avant que l’interprète n’ai pu se lever du lit, Caolan avait enfilé un T-shirt et un short, et était parti chercher le petit-déjeuner au rez-de-chaussée. Chaque matin où il se réveillait avec Neil, que ce soit dans sa chambre ou la sienne, l’Irlandais allait chercher double ration de petit déjeuner anglais, ce qui avait tendance à étonner tout le monde. L’endroit où s’amassait toute la nourriture qu’il pouvait manger restait un mystère – parce que oui, l’archéologue mangeait bien, et ne grossissait pas.
Il remonta à la chambre avec son plateau, et réussit à maintenir le tout en équilibre jusqu’au bureau, sur lequel il posa l’actuel objet de ses convoitises. L’archéologue fit ensuite le tour de la pièce en sautillant comme un chien fou, et large sourire barrant son visage et sa barbe de deux jours, pour aller ouvrir doucement les persiennes et les fenêtres, laissant une brise encore fraîche pénétrer dans la chambre.
- Caolan : Debout la marmotte ! On a une grosse journée – encore. Et ne me dis pas que les fossiles peuvent attendre, ils l'ont assez fait comme ça ! lança-t-il avec un rire détendu, avant de ramener le plateau sur le lit.
Il le cala sur ses jambes croisées de manière à ce qu’il ne bouge pas, et commença à manger tranquillement son assiette – combien de fois lui avait-on dit qu’à manger trop vite il tomberait malade ? Il avait compris, à présent –, poussant celle de Neil vers lui avec un sourire.
- Caolan : Il va encore faire chaud, aujourd’hui. annonça-t-il entre deux bouchées, comme si c’était un scoop.
Le site sur lequel il travaillait actuellement l’intéressait (presque) autant que Neil. Il fallait dire que Didymes avait un certain charme, et d’après l’équipe de scientifiques qui étaient resté travailler un peu plus longtemps, il y avait peut-être un moyen d’accéder au plus profond du sanctuaire d’Apollon. Rien que l’idée d’aventures et des secrets que cela pouvait renfermer le faisait frémir – mais sans doute pas autant que son compagnon en était capable.
Neil dormait du sommeil du juste, et même du bienheureux.
Ni cauchemars, ni rêves ne venait agiter son sommeil ou troubler ses traits : de quoi aurait-il pu rêver ? Il ne manquait de rien, il était heureux et profitait de chaque jour avec un joie de vivre qui correspondait plus à la vingtaine de Caolan qu'à son âge bientôt raisonnable. Un bonheur et une sérénité qui prendraient bientôt fait pour disparaître tout à fait de son existence pour...mettons une dizaine d'années, en gros... Le jeune homme de trente ans, torse encore immaculé de cicatrices, qui ne pouvait se plaindre que d'un léger coup de soleil sur sa peau britannique et de quelques marques issues de la nuit agitée qu'ils avaient passés, ce jeune homme là savourait la vie et dormait sans savoir qu'il s'agissait de l'une de ses dernières nuits complètes. Suivraient bientôt cauchemars, insomnies, et son humeur se trouverait largement assombrie...jusqu'à une éclaircie inattendue, mais dans de nombreuses années.
Oui, il était heureux. Mais, hey de quoi pouvait-il bien se plaindre ?
Il faisait un métier qui le passionnait et qu'il aimait de tout son être. Non seulement apprendre de nouveaux langages, mais également de nouvelles cultures, rencontrer de nouvelles personnages... Pratiquer l'arabe et ses nuances, sur le terrain, sous le soleil brûlant, avec pour seule tâche de parler à des individus et à rapporter leurs propos à Caolan ? Quand en plus les dits propos évoquaient l'histoire ancienne de ces pays et non pas d'ennuyeux discours politiques, où était le mal ? Il faisait un métier qu'il aimait, dans un pays qu'il adorait. Et bien sûr depuis bientôt un an maintenant, le faire au côté d'un archéologue à l'enthousiasme jamais entamé, et pour lequel il avait plus que de l'affection. Et le fait que cet être qui alliait et l'intelligence ( Neil ne comptait plus les choses qu'il avait apprise à traduire ses paroles, ni le nombre d'informations pour lesquelles il était totalement largué ), et la passion ( une fois lancé sur ces domaines de compétences Caolan ne s'arrêtait plus et Neil ne faisait même pas mine d'essayer de l'interrompre puisque leurs passions et intérêts se rejoignaient) et la beauté ( car oui, d'accord, le regard de l'interprète s'occupait plus souvent de Caolan que des fresques que celui-ci lui montrait. Coupable sans procès, et sans le moindre remords ) partage régulièrement ses draps.... c'était un plus très agréable.
S'ils avaient été en vacances en ces lieux, comme un couple banal...nul doute qu'ils auraient occupé leur temps aux mêmes activités ( le salaire en moins ). Alors, oui, il se satisfaisait de ce quotidien plus qu'agréable. S'il devait être perfectionniste, oui il aurait apprécié que sa mère soit encore en vie, d'avoir quelques nouvelles de son père ou de sa sœur, ou que Caolan assume parfaitement leur relation ...mais objectivement ? Il était heureux et profitait de ce qui lui était offert avec une insouciance qui lui aurait fait écarquillé les yeux dix ans plus tard.
En attendant de devoir affronter la tornade qu'était Caolan mis sur la piste de quelques ruines et fouilles encore mystérieuses, il se prélassait dans les draps de l'hôtel, goûtant encore quelques secondes de repos. Il était étendu en travers du lit, Caolan niché contre son torse pour quelques instants encore. Il dormait toujours d'un sommeil léger, et le poids quittant sa poitrine ou les lèvres de Caolan effleurant les siennes suffisaient à l'éveiller. Neil posa son bras sur ses yeux avec un grognement Il avait le temps de s'éveiller, Caolan étant déjà parti chercher leur petit déjeuner avant même qu'il ait pu esquisser le geste de le rattraper. Comme cela serait le cas toute la journée, Neil tentant vaguement soit de le retenir avant qu'il ne touche à quelque chose qu'il n'aurait pas du toucher, soit de passer son bras autour de ses épaules pour l'inciter à une pause...en vain ( toujours en vain).
« - Debout la marmotte ! On a une grosse journée – encore. Et ne me dis pas que les fossiles peuvent attendre, ils l'ont assez fait comme ça ! » Neil daigna entrouvrir les paupières pour poser son regard bleu sur le jeune homme qui venait de s'asseoir près de lui, portant un plateau lourdement chargé de leurs petits déjeuners. Déjà habilé, déjà souriant et sautillant d'enthousiasme ; la vision attira un sourire sur les lèvres de l'aîné qui se moqua gentiment, sa main effleurant machinalement la cuisse de Caolan. « -Les fossiles peuvent attendre, les pyramides peuvent attendre, les momies peuvent attendre..même moi je peux attendre, il n'y a que toi qui ne peut pas attendre. »
Il se redressa sur ses coudes et finit par s'asseoir à son tour dans le lit. Neil lui vola un furtif baiser avant de tirer le plateau repas à lui, et prenant précautionneusement sa tasse de thé – l'idée de voir le liquide brûlant de déserver sur le lit pouvait lui donner des caucheamrs. « Il va encore faire chaud, aujourd’hui » Pas une surprise. Pas que Neil s'en plaigne. Il adorait le climat de cette région, même s'il s'agissait d'un parfait paradoxe au vu de ses origines et des rues pluvieuses où il avait passé son enfance. Il n'y avait rien de mieux qu'un soleil éclatant pour lui rendre sa bonne humeur, et le climat chaud et sec de la région l'empêchait de trop subir les effets du pollen...et vu à quel point il y était allergique, c'était réellement une bénédiction. Prenant une gorgée de thé, il lança un regard amusé à son compagnon :
« -Nooon, vraiment ? Chaleur, sable, cailloux... Oui je vois, exact même paysage depuis dix ans, je vais finir par m'en lasser...Qu'est-ce que tu as en tête cette fois ? »
Est-ce qu'il allait devoir faire semblant de s'intéresser à un tas de cailloux vieux de quelques siècles ou juste éviter de se faire fracasser le crâne par d'autres cailloux ? Non, mais, qu'il s'habille en conséquences quoi.
Un matelas confortable – plus confortable que les paillasse et les sacs de couchages – un bon petit déjeuner, un copain sexy et adorable… Que demande le peuple (ou Caolan, dans ce cas-là) ? Des ruines, des ruines, des ruines ! De préférences, des tombeaux, des sanctuaires, des endroits glauques, sombres, pleines de pièges (accessoirement), car il s’agissait toujours des plus intéressant. Avec Neil, évidemment, sinon c’est moins drôle. Quoi que Caolan aimerait bien, un jour, amener quelqu’un qu’il déteste dans un tombeau, déclencher un piège et se tailler sans rien dire, juste pour voir ce que ça faisait quand une boule écrasait quelqu’un à l’époque, et si le piège était réellement bien pensé… La main de Neil effleurant sa cuisse le ramena à la réalité et lui tira un autre sourire.
- Neil : Les fossiles peuvent attendre, les pyramides peuvent attendre, les momies peuvent attendre… Même moi je peux attendre, il n'y a que toi qui ne peut pas attendre.
Un rire léger et sincère s’échappa des lèvres de l’Irlandais, alors admettait volontiers que l’anglais avait raison. Peut-être n’y avait-il que lui qui ne pouvait pas attendre mais il était intimement persuadé que les fossiles – même s’ils avaient appris à être patients – attendait sa venue. Mais il laissa son esprit dériver le soleil, annonçant comme un oracle qu’il allait encore faire chaud…
- Neil : Nooon, vraiment ? Chaleur, sable, cailloux... Oui je vois, exact même paysage depuis dix ans, je vais finir par m'en lasser...Qu'est-ce que tu as en tête cette fois ?
Un demi-sourire barra le visage de Caolan alors qu’il finissait d’avaler une tranche de bacon. L’archéologue posa un regard taquin sur son compagnon, avant de susurrer ;
- Caolan : Et si je me mettais à déambuler nu dans la chaleur, sur le sable et les cailloux, tu te lasserai aussi du paysage ? Le jeune homme se pencha vers Neil en riant pour l’embrasser, avant de terminer son assiette avec rapidité. Les scientifiques ont trouvé une entrée vers ce qui paraît être une Sanctuaire d’Apollon… Et… Si tu n’y vois pas d’inconvénient… Je rentrerais bien là-dedans…
Le jeune homme avait pris une petite voix, avant d’offrir deux grands yeux implorants à son compagnon, lui donnait l’illusion qu’il avait le choix, glissant sa main dans la sienne pour refermer ses doigts autour et la presser doucement. Sans le lâcher du regard, il porta la tasse à ses lèvres et termina son thé, avant qu’un éclair (de lucidité ? Pas vraiment) ne passe dans son regard.
- Caolan : Hey ! Si on prenait un lapin, il pourrait aider à gratter, non ? Peut-être même qu’il détecterait les pièges et qu’à vous deux, vous empêcherait ma malchance de les actionner ? C’est mignon, un lapin. Jamais Caolan n’avouerai que c’est sa curiosité qui déclenche environ 90% des pièges dont ils manquent d’être les victimes. Il afficha un air rêveur pendant quelques secondes, avant de prendre une moue boudeuse. Quoi que non, j’ai peur que tu finisses par t’occuper plus de lui que de moi…
Il ne tint pas son expression longtemps avant que la joie ne reprenne place sur son visage. Poussant le plateau, il roula sur Neil pour le prendre dans ses bras en roucoulant. Si l’archéologue était plus réservé en publique, héritage de ses « mauvaises expériences », il n’était pas avare de cajoleries lorsqu’ils n’étaient que tous les deux, aussi se mit-il à disperser des baiser dans le cou de Neil avant de finir sur ses lèvres, rouler à nouveau et sauter sur ses jambes.
- Caolan : Tu te lèves ? demanda-t-il plein d’espoir.
Neil était réconnaissant pour quelques petites choses : les hôtels occidentaux fournissant des petits déjeuners anglais complets dans les règles même dans ces coins bien éloigné de sa campagne anglaise natale, l'absence de fleurs en plein désert, le climat chaud des environs, la compagnie de Caolan...et d'être du matin. Il venait à peine d'ouvrir les yeux, que déjà Caolan sautillait avec enthousiasme, ses paroles vives s'égarant sans queue ni tête. Par bonheur l'anglais ne faisait pas partie de ses marmottes qui se traînent l'esprit embrumé au réveil jusqu'à avoir pris le temps de se réveiller. Caolan n'aurait certainement eu aucune pitié si cela avait le cas. Le brun sirotait son thé et grignotant un toast, prêtant une oreille peu attentive aux divagations de son cadet. Ne lui faites pas dire ce qu'il n'a pas pensé ; Neil adorait l'écouter parler – une chance – et ils s'étaient d'abord liés intellectuellement avant qu'il parvienne à l'attirer dans ses draps. Mais Caolan n'attendait pas réellement une réponse de son compagnon, les matins comme celui-ci.
« - Et si je me mettais à déambuler nu dans la chaleur, sur le sable et les cailloux, tu te lasserai aussi du paysage ? » Le sourire qui monta aux lèvres de Neil lui faisait des fossettes et pouvait facilement être qualifié de légèrement gaga et stupide. Amoureux, aussi, si cela ne lui avait pas donné envie de se barrer comme un dératé. Il secoua la tête et reposa sa tasse de thé vide sur le plateau, avant de répliquer d'un air par trop innocent. « - Tu sais que j'aime bien ce paysage. Et te voir nu. Mais si c'est pour t'entendre te plaindre de coups de soleil sur les fesses pendant trois jours ... »
Le regard de Neil descendit le long du corps de son compagnon, taquin. Il n'osait même pas imaginer à quel point le jeune homme pouvait être une horreur une fois malade ou blessé...à moins qu'il ne tente de retourner sur les sites de fouilles sans écouter les avis et qu'il doive le forcer à garder le lit … pas une mauvaise idée, en soi. « -Les scientifiques ont trouvé une entrée vers ce qui paraît être une Sanctuaire d’Apollon… Et… Si tu n’y vois pas d’inconvénient… Je rentrerais bien là-dedans… » Grands yeux implorants, bouille à tomber, voix innocente, et ses doigts enlacés aux siens. L'archéologue lui faisait l'honneur de sortir le grand jeu pour le « convaincre » . L'honneur car il aurait pu aussi bien le prendre par la main et l'entraîner sans lui demander son avis. Au moins il y mettait les formes et le charmant sourire. Caolan y entrerais de toute façon, et par son boulot, Neil était forcé à l'accompagner.... mais il y avait pire torture. « -Hey ! Si on prenait un lapin, il pourrait aider à gratter, non ? Peut-être même qu’il détecterait les pièges et qu’à vous deux, vous empêcherait ma malchance de les actionner ? C’est mignon, un lapin. »
« - Non. »
Répliqua tranquillement Neil en mangeant son bacon, sans même regarder son partenaire et patron. Eviter tout contact visuel, voilà la clef, ne pas s'attarder sur le joli sourire et le regard pétillant de son vis à vis. Il serait capable de lui céder. C'est mignon un lapin, mais Neil doutait qu'il puisse leur être d'une quelconque utilité, ou suffisant pour détourner la « malchance » de Caolan, malgré la réputation de ses pattes. Et surtout, surtout il n'avait guère envie de devoir consoler son compagnon si le lapin subissait un destin tragique quelconque. « Quoi que non, j’ai peur que tu finisses par t’occuper plus de lui que de moi… » Neil lui lança un regard éberlué et amusé, faisant mine de lui envoyer son oreiller au visage. L'hôpital se moquant de la charité, l'archéologue de l'interprète.
« -Tu parles, tu serais à le cajoler à longueur de temps, sans aucun regard pour moi. »
Comme pour contredire ses propos, Caolan lui sauta au cou et Neil serra ses bras autour de son compagnon avec un soupire bienheureux. Pour être honnête, si on oubliait les momies, il n'avait pas de quoi se plaindre ; Il y avait juste beaucoup trop de momies. « - Tu te lèves ? » Un sanctuaire. Que pouvait-il arriver de bien terrible dans un sanctuaire d'Apollon, hm ? Neil soupira et rejeta les draps pour sortir du cocon de tendresse où il était encore niché. Tant qu'il n'aurait pas tripoté tout ce qu'il y avait à tripoter au sanctuaire, Caolan ne le laisserait pas en paix.
« -Est-ce que j'ai le choix ? »
L'anglais passa un boxer et une chemise à manches courtes légère, mais interrompit le boutonnage de celle-ci pour rattraper Caolan qui s'impatientait. Il le saisit cependant par la taille, par-derrière pour l'enlacer et lui voler un baiser sur la mâchoire, sans prendre garder à sa barbe de quelques jours. Autant profiter, ce serait sans doute l'un des derniers gestes d'affection de la journée, l'archéologue n'étant pas friand des démonstrations publiques. Neil, lui n'avait aucun problème avec ça et devait parfois se retenir d'un geste trop familier. Enfin, ce n'était pas comme s'il était particulièrement câlin, de toute façon.
« - A moins que... »
Lui chuchota-t-il à l'oreille, un sourire aux lèvres avant de le relâcher à regret. Il ne conviendrait jamais de revenir au lit avec lui, c'était un combat perdu d'avance et toutes les câlineries du monde n'y changeraient rien. S'habiller donc. Pantacourt, keffieh et lunettes de soleil.
Quelques minutes plus tard, les deux occidentaux étaient en direction du sanctuaire d'Appollon ; des pierres, des colonnes, quelques individus déjà sur le site, un soleil éclatant et un Caolan complètement extatique. Laissant son compagnon divaguait dans son coin, Neil se porta à la rencontre des chercheurs déjà présents. Il avait le sourire facile, un physique agréable et parlait à la majorité des langues pratiquées dans le pays et sur les fouilles. Il faisait donc son boulot d'interprète en discutant avec les autres scientifiques, sachant très bien que dès que Caolan aurait fini de faire wah en se frottant le menton, il voudrait tout savoir. Neil discutait donc avec animation en arabe avec les confrères de Caolan, jusqu'à ce qu'il entende un léger bruit semblable à un miaulement ou à un couinement provenant de derrière un éboulis de pierre. Neil esquissa un sourire en direction des autres hommes avant de se décaler, vers le cri, agitant le bras pour attirer l'attention de Caolan ;
« - Caolan ! »
Quoique ce soit – un chameau mutant ou une momie ressuscitée aussi bien qu'un oisillon tombé du nid, Caolan serait intéressé, et surtout lui en voudrait s'il ne l'appelait pas. Et accessoirement, à partir du moment où ils pénétraient sur un site de fouille, le côté protecteur de Neil aimait avoir l'archéologue à portée de vue et de mains, et pas uniquement pour profiter du paysage de ses fesses. Plutôt parce qu'il possédait un talent rare pour tomber dans les ennuis jusqu'au cou.
La réponse de Neil à sa proposition de déambuler nu sous le soleil lui arracha un nouveau rire. En effet, il serait fort désavantageux pour eux qu’il n’attrape un coup de soleil au derrière – surtout que monsieur était douillet quand ça lui prenait, et si en plus on était aux petits soins pour lui… Un vrai comédien ! Mais son sourire retomba devant la réponse négative de l’interprète. Il ne voulait pas de lapin ? Pourquoi ne voudrait-il pas de lapin ? C’est adorable et… Le lapin le remplacerait-il ? Alors qu’avec une moue feinte, il évoque cette idée, l’anglais réplique que ça serait plutôt l’inverse. Il n’a qu’à moitié tord cependant ;
- Caolan : Comment peux-tu croire que je n’aurais plus un regard pour toi ? demanda-t-il en prenant un air vexé de son manque de confiance.
Mais le jeune et fougueux archéologue ne pouvait résister bien longtemps à son camarade (a vrai dire, il n’en avait même pas l’envie), et il se jeta dans ses bras pour le cajoler une dernière fois avant de se lever pour de bon. Il se retenait de sautiller à côté de Neil qui s’habillait, lorsque celui-ci, n’ayant même pas terminé de boutonner sa chemise, l’attrapa par derrière, enlaçant sa taille, déposa un baiser sur sa mâchoire avant de susurrer ; « A moins que… » Caolan se tend légèrement en coulant un regard vers lui. Heureusement, Neil le connait et ne pousse pas la ‘‘plaisanterie’’ plus loin ; de toute façon, Caolan était bien trop excité par la perspective de ses fouilles pour céder au pauvre interprète, qui termine de s’habiller.
Comme s’il n’avait pas déjà été jeter un coup d’œil à ce qui était visible de l’extérieur, Caolan sautait à nouveau partout, courant de droite à gauche pour faire d’ultime repérage avant de pouvoir entrer dans le sanctuaire, griffonnant encore quelques notes sur un bout de papier. Il laissait à Neil son travail d’interprète ; il ne voyait pas l’intérêt de rester planter à côté comme un imbécile, à sourire bêtement et à hocher la tête alors qu’on disait peut-être « Hey Neil, ton pote l’archéologue il a une tête de con… Ouais, il est con et en plus il approuve ! »… Il préférait éviter ça. Quand il n’y avait pas de ruines pour le distraire, oui, il restait avec son petit ami. Mais quand il pouvait l’éviter, il le faisait ; l’Irlandais savait que, de toute façon, il aurait un rapport à la fin. Alors qu’il pense à tout cela, il relève la tête. Neil lui fait un signe ; il lève lui aussi sa main en souriant pour le saluer, avant de rougir en se rendant compte qu’il l’appelait.
- Caolan : Que se passe-t-il ?
Mais il n’a pas besoin que l’anglais lui réponde ; son regard se tourne vers l’origine des couinements. Son cœur s’envole dans une excitation nouvelle. Il y a un truc coincé là-dessous, et au bruit que ça fait, ça ne peut pas être une momie, n’est-ce pas ? Caolan dévale une petite pente, glissant plus sur les cailloux qu’autre chose et manquant par deux fois de se casser la figure, avant d’arriver à un éboulis qui avait dû se former peu de temps auparavant. Il commence à soulever quelques pierres et, aidé par Neil, il réussir à trouver qui poussait ce cri. Mais la vue première d’un cadavre de renard des sables adulte le fit se jeter dans les bras de Neil avec un petit cri. Que l’anglais profite de ce tendre moment de détresse, car il ne durera pas ; Caolan prend sur lui pour ne pas défaillir. Comment un homme de sa trempe – qui est capable de voir des momies en décomposition sans ciller – peut être aussi sensible face au cadavre d’un petit animal ? Mais soudainement, ses yeux retrouvent de leur éclat alors qu’un bébé s’extirpe des décombres, vivant, par la sortie qu’ils lui ont créée en enlevant des pierres.
- Caolan : Oh mon dieu, c’est… C’est… Il s'arrêta pour penser ; C’est mille fois plus mignon qu’un lapin ! C’est adorable ! l’archéologue attrapa fébrilement le petit fennec et le présenta à son petit ami ; Regarde ! On le garde, hein ? Il n’a plus de parents… Il m’aime déjà !
Un génie doublé d'un abruti. Neil roule des yeux d'un geste éloquent, alors que Caolan agite la main pour lui rendre un salut qu'il ne lui a jamais donné. Caolan, Caolan... Neil était amoureux de son esprit, adorait parler avec lui et il se laissait souvent bercer par son babil incessant, qui recelait savoir sur savoir, la somme de connaissances que possédait l'archéologue ne cessant de l'émerveiller et de le ravir. Mais parfois, il se comportait comme un adolescente naïf et un peu stupide. Neil était devenu extrêmement bon pour afficher à la fois un sourire tendre – le gaillard qui lui servait de petit ami était amusant et adorable quand il faisait ce genre de gaffes – et pour rouler des yeux d'un air désabusé dans le même temps. Aux interrogations dans le dialecte du cru que lui faisaient les autres membres de l'expédition, Neil répondit dans la même langue avant de dégringoler la pente pour rejoindre l'archéologue.
Ah, et cette fois, c'était bel et bien une moquerie à l'encontre Caolan. En ben quoi ? Neil était connu pour avoir un humour stupide ( qui a dit anglais ? ) et il était d'autant plus facile de se laisser aller aux remarques sarcastique quand on pouvait le faire dans une langue étrangère ( et que les autres locuteurs riaient, eux ! ) Et ce d'autant plus lorsque de toute façon, la cible des moqueries ne l'entendrait sans doute même pas, plus occupé à essayer de déplacer des cailloux pour atteindre l'origine du couinement. Avant de se faire houspiller par son amant, Neil lui prêta main-forte, sans rappeler que merci bien, les gens du crus embauchés sur les lieux de fouille étaient justement là pour le travail de force. L'effort physique et la matérialité du job – les mains dans la poussière – lui plaisait, bien plus que l'ennuyeux travail de bureau. De plus, ils auraient eu l'air ridicule si n'importe qui d'autre s'était tenu là, et enfin...Caolan aurait explosé le temps qu'il trouve quelqu'un pour les aider. Au boulot, donc.
Neil s'accouda à la pierre aisnidélogée, reprenant son souffle et laissant Caolan la primeure de la découverte. Son regard était curieux. Attitude blasée et faussement flegmatique,typiquement britannique, mais cela ne voulait pas dire qu'il ne tendait pas le menton pour voir de quoi il s'agissait. Des cadavres, et il réceptionna presque machinalement Caolan...et un bébé et il sentit comme une impression de déjà vu l'envahir. Il secouait la tête alors que Caolan commençait à s'exclamer. « Oh mon dieu, c’est… C’est… C’est adorable ! » Quel terme surprenant. Au moins il y avait deux créatures adorables dans l'aire des fouilles. Neil leva un sourcil, tandis que son petit ami continuait. « Regarde ! On le garde, hein ? Il n’a plus de parents… Il m’aime déjà ! » « Non. »
Ton posé, voix grave, ton déterminé. Non. Il saisit doucement Caolan par les épaules, et le fit reculer ; l'écartant du regard des autochtones et autres érudits amassés sur le secteur des fouilles, les dissimulant derrière une roche. Ce n'était pas qu'il n'était pas sensible à la mignonitude de l'animal ( il adorait les animaux, et était incapable de résister à Caolan, CQFD ) ou qu'il n'avait pas lui aussi envie de le garder ( il pouvait déjà entendre les arguments de Caolan, et objectivement il les comprenait ). Mais bon, il fallait bien un adulte responsable ( et grognon, ronchon et abominablement chiant, heureux de vous rencontrer aussi ) par couple. Parce que , un bébé fennec c'est bien mignon, mais s'il meurt, se fait écraser ou se perd, Caolan ne s'en remettrait pas ( rien qu'à voir sa réaction face au cadavre de la mère du petiot ) et Neil n'avait pas le courage de le soutenir dans une telle épreuve. Les câlins matinaux, les rêveries du soir et les courses-poursuites avec les momies, il était d'accord, mais s'occuper d'un bébé animal ou le réconforter durant le deuil de celui-ci ( soyons honnête, les chances de survie de la mignonne boule de poil n'étaient pas très grandes ) consistait à un engagement émotionnel bien trop grand pour Neil qui se sentait mal à l'aise rien que d'y penser. En conséquence, il évitait soigneusement de regarder le petit animal alors même que l'archéologue le lui mettait devant les yeux avec acharnement. Sauf qu'il ne pouvait non plus regarder la moue suppliante de son amant. Voilà, le gros caillou ( sans doute d'importance archéologique inégalable ) derrière eux, parfait. « - On ne peut pas l'emmener sur les fouilles, tu imagines...la poussière, les vapeurs...ça peut être dangereux pour lui ! Et....s'il y a des momies, ça... »
Ton grave et caressant pour le convaincre d'adhérer à ses vues et de reposer le … oui, non, arrêtez tout, rien que l'idée de Caolan reposant le fennec au sol dans le tas de terre et de sa famille morte n'avait aucun sens et criait l'incohérence psychologique grave. Des cris en arabe retentirent vers l'entrée principale, et Neil redressa la tête, prêtant l'oreille au babil. Il leva un sourcil et traduisit à Caolan, d'un air désolé : «- Ils s'apprêtent à ouvrir le sanctuaire. »
Saisir le diable à bras le corps, ou plus exactement le fennec couinant et gémissant dans ses bras. Le brun récupéra l'animal qui s'accrocha à lui, plantant ses petites griffes dans sa chemise – non ne pas penser à son petit cœur battant et paniqué, à la chaleur de ce petit être vivant contre lui et le besoin absolu qu'il ressentait de le protéger et de le secourir. « - Tu ne veux pas manquer ça, non ? »
Son expression se décomposa, littéralement. Non, Caolan n’était pas en passe de devenir une momie, mais toute excitation venait de le quitter à l’instant. Neil avait dit « Non », et le ton de sa voix montrait bien que sa décision était prise. Du moins, c’est ce qu’il voulait bien faire croire, et que Caolan croyait de bon cœur (comment ça, c’était injuste de croire son petit ami aussi ferme et sévère ?). Il laissa l’anglais le saisir par les épaules pour le faire reculer. Néanmoins, l’archéologue avait les bras tendus autant que faire se peut, mettant l’animal en rempart entre eux deux. Il ne voulait pas l’abandonner à son triste sort ! C’était cruel, pourquoi diable Neil avait-il aussi peut de cœur pour les animaux, aussi mignons soient-ils ? Qu’il ne veuille pas d’un lapin – de l’idée d’un lapin – Caolan voulait bien comprendre. Mais qu’il refuse d’adopter une si jolie petite créature, seule, orpheline, et bien réelle !... Si vous voulez mon avis, et celui de l’Irlandais, il était plus que temps de passer à la vitesse supérieure, et d’offrir à Neil le regard le plus tristement mignon de la terre, le plus suppliant possible. Et cela fonctionnait, en général, puisque l’anglais préférait fixer un point quelconque dans son dos plutôt que le fennec ou lui-même. Ce qui, en soi, était assez vexant, mais passons. « - On ne peut pas l'emmener sur les fouilles, tu imagines...la poussière, les vapeurs...ça peut être dangereux pour lui ! Et....s'il y a des momies, ça... »
Caolan baissa doucement le regard sur la petite boule de poils, en pinçant les lèvres. Pourquoi avait-il l’impression d’entendre exactement ce que lui avait dit l’anglais, avant qu’il ne l’entraîne dans son premier tombeau – dans son deuxième, pardon, Caolan ne l’avait pas prévenu à l’avance pour les momies. Il releva les yeux vers son amant et, avec le regard le plus tendre possible, rétorqua d’une voix douce ;
« Pour toi aussi c’est dangereux, Neil. Si tu préfères rester dehors, avec lui, vous seriez en sécurité. » Il hésita un instant, sentant quelques rougeurs colorant son visage alors qu’il bafouillait ; « Tu sais, je… Peut-être que… Je serais triste… » inconsolable était le mot juste, « … s’il était tué, mais… J’ai toujours peur de provoquer ta mort en t’entraînant là-dedans. Je ne m’en remettrais jamais… »
Voilà. C’était dit. Déclaration d’amour made in Caolan. Le visage de l’archéologue était devenu rouge écarlate car, même s’ils étaient tous les deux cachés derrière un rocher, ils n’étaient pas à l’abri dans l’intimité de leur chambre… Quoi qu’en y pensant bien, les murs de l’hôtel n’étaient pas épais… Et on pouvait très bien se demander ce qu’ils étaient en train de faire, ici, caché de tous, et… Caolan mis toute sa force à se concentrer sur le fennec, histoire d’aérer son esprit et de penser à toutes ces choses le rendant pivoine. Ce furent des cris qui le firent descendre sur terre – cris qu’il ne comprenait évidemment pas, et que Neil lui traduisit immédiatement. Caolan espérait s’enfuir jusqu’à la porte du sanctuaire avec le petit animal dans les bras, prétextant aller le reposer à l’abri, et le planquer dans son sac, mais… L’anglais le lui enleva des bras, sans qu’il ne prenne la peine de lutter ; cela ne servait à rien, et il risquait de blesser le petit animal qui s’accrochait à la chemin de son petit ami, comme un naufragé s’accrocherait à sa bouée. « Tu ne veux pas manquer ça, non ? » « Non… Bien sûr que non. » Il ne manquait plus que ça, que l’archéologue ne soit pas là au moment où on a le plus besoin de lui – au moment où les ruines on le plus besoin de lui. Le regard rivé sur le sol, il contourna Neil pour remonter la pente, mais s’arrêta à sa base ; « Neil, je ne veux pas que tu viennes. Je saurai me débrouiller tout seul, mais pas lui. Ne l’abandonne pas… Regarde-le. » il esquissa un sourire triste ; « S’il te plaît. »
L’arme fatale. L’apparente dépression, l’attitude qui respirait une tristesse infinie. Oui, Caolan sortait le grand jeu. Il remonta la pente, et s’approcha du sanctuaire. On parlait arabe et il ne comprenait pas, mais cela n’avait guère d’importance ; il y avait, derrière lui, l’homme le plus sexy du monde avec une adorable créature dans les bras (du moins l’espérait-il encore) et, devant lui, des ruines qui criaient son prénom – il les entendait presque.
Pas les yeux de chiot ( fennec ? ) battu, par pitié. Neil aurait du le voir venir;c'était l'arme préférée de Caolan, et elle avait, il fallait l'avouer, le mérite de fonctionner à presque tous les coups. Que pouvait-il dire ? Il était faible face aux mines attristées et traumatisées de son amant, quoi de plus normal ? De plus, ce fourbe maintenait l'animal entre leurs corps, empêchant Neil de s'approcher de lui et de le prendre dans ses bras pour tenter de lui imposer son point de vue – ce n'était certes pas une méthode plus honorable que les yeux suppliants, et la manipulation sentimentale que l'archéologue lui imposait, mais Neil n'était pas prêt à l'admettre pour l'heure. L'anglais en était donc douloureusement réduit à fixer le sable du désert, par-dessus l'épaule de Caolan. Son désert adoré, dont la chaleur vibrante avait conquis son cœur il y a des années. Contrairement au jeune homme qui se tenait devant lui, dont la beauté rivalisait presque avec ce pays. Presque. Le désert et les ruines ont beau être fourbes et dangereux, ils n'essaient pas de vous manipuler à coups de mots doux et de sourires adorables.
« Pour toi aussi c’est dangereux, Neil. Si tu préfères rester dehors, avec lui, vous seriez en sécurité. Tu sais, je… Peut-être que… Je serais triste… … s’il était tué, mais… J’ai toujours peur de provoquer ta mort en t’entraînant là-dedans. Je ne m’en remettrais jamais… » Au début de ce mignon petit discours aromatisé aux fraises ? Neil roula des yeux, dans une dignité mâle et affectée. Ils avaient déjà eu cette discussion plusieurs fois, mais généralement c'était l'interprête qui l'amenait. Pour enguirlander proprement son archéologue qui avait une manière bien à lui de fouiller des tombes et de déclencher tous les pièges qu'il pouvait trouver, mettant leurs deux vies en danger de manière récurrente. Au grand mécontentement de l'anglais.
Mais...la suite ? On versait dangereusement vers l'amour et les démonstrations de romantisme. Ce genre de discours n'était pas familier du couple, comme le prouvait la rougeur qui montait au visage de l'archéologue. Au grand soulagement de Neil. Si la volonté de Caolan de cacher à tout prix et à tous l'agaçait parfois, étant sorti du placard depuis longtemps, il était tout à fait satisfait du côté pudeur de sentiment. L'amour et les déclarations le faisaient fuir, reculant comme un lâche de situations qui le rendaient très mal à l'aise. Alors que le rouge montait aux joues de Caolan, Neil se sentait lui glacé de l'intérieur, figé sur place comme un fennec face à une voiture au milieu de la nuit. Cherchant une voie de secours avec un désespoir pathétique, bien que son visage impassible n'en laisse rien – ou presque rien montrer.
Il fut libéré de cette situation inconfortable par le déclenchement des fouilles, vers lequel il poussait Caolan. « Neil, je ne veux pas que tu viennes. Je saurai me débrouiller tout seul, mais pas lui. Ne l’abandonne pas… Regarde-le. S’il te plaît. » Neil obéit sagement, et regarda le fennec qui s'agitait dans ses bras, en profitant pour détourner le regard de son amant qui s'éloignait. Les deux spectacles étaient attendrissant, mais le brun éprouvait le besoin de perdre un instant des yeux Caolan. Pour le bien de son équilibre mental. Et être abandonné, laissé en plan avec la bestiole...C'était un soudain soulagement. Il ne pouvait pas faire face à un Caolan suppliant, mais un Caolan sentimental le repulsait presque.
« Dans cinq minutes, il revient parce qu'on lui manque ou qu'il veut nous montrer quelque chose. Ou parce qu'il a failli mourir, » ajouta Neil d'un ton plus sombre.
Une part de lui, égoïste et méchante, souhaita soudain que ce soit le cas, que Caolan finisse à l'hôpital ( juste une jambe cassée, il était loin de lui souhaiter la mort ) qu'il ait une excuse pour soudain fuir, pour demander une autre mission d'interprétariat, auprès de quelqu'un d'autre. Neil baissa les yeux sur le petit animal qui mâchouillait vivement le revers de sa veste et soupira. Il s'assit au sol, les jambes croisés et laissa le soleil chauffer son dos, dénouant ses muscles. Au fil des minutes livré à lui même
Le plaisir d'être assis sur le sable, d'entendre vaguement des paroles arabes s'échanger au lointain commençait lentement à supplanter l'envie de fuir vers le couchant, de disparaître dans les dunes et de ne plus s'engager dans de tels palabres humains. Neil jouait machinalement avec le fennec, dont l'angoisse s'était effacée, accompagnant celle de l'homme. La petite bête venait de planter ses crocs dans son doigt, par jeu, lorsque des hurlements s'élevèrent soudainement du chantier de fouilles.
« -Caolan... »
Neil se releva avec un soupir, sans précipitation pourtant, et récupéra au passage le fennec. Il jappa de surprise, à sentir la main de l'homme passer sous son ventre pour le soulever. Neil n'avait pas envie de revoir Caolan présentement. Il n'avait pas envie de lui parler, de soutenir son regard et son sourire et brusquement, être sociable et aimant lui semblait un fardeau bien trop lourd. Mais il n'était pas non plus dans sa nature de regarder des gens souffrir ou être en danger sans rien faire. Au contraire, il se sentait responsable de tous ceux qu'il cotoyait, capable de se mettre lui-même en danger pour les protéger, envers et contre tout. Il vérifia machinalement que le revolver donné par ses compagnons soldats était bien passé à sa ceinture, et se mit à gravir la dune, le fennec blottit contre lui, museau dans son cou et griffes enchâssées dans sa veste. Et un mauvais pressentiment au creux de l'estomac.
Si Caolan savait que faire ses yeux de chien battu à Neil marchait à tous les coups – ou presque – il avait oublié que les déclarations d’amour le faisaient fuir et, emporté dans son élan, il avait laissé son cœur débordé sur ses paroles, avant de s’éloigner. Il s’était tout d’abord attendu à ce que l’interprète le rejoigne (avec le fennec, s’il vous plaît !), avant de se rendre peu à peu compte de ce qui s’était passé, et l’amertume teinta sa jubilation. Caolan avait parfois l’impression d’être un jouet dont l’anglais finirait par se lasser. Peut-être était-ce le cas, d’ailleurs ; Caolan le comprendrait et n’y pourrait rien. Il était beaucoup trop sentimental, il le savait. Un coup d’œil lancé en arrière lui appris que Neil n’avait pas bougé. Pourquoi Caolan ne pouvait-il pas se contenter de ce qu’il avait ? Pourquoi avait-il fallu qu’il insiste pour sauver la boule de poil ? Tout le monde le sait, les animaux, on les laisse mourir !... Il ne parvenait même pas à être en colère et, au fond, s’exaspérait tout seul ? Sa vie, quand il l’embrassait du regard, dans son ensemble, lui semblait être dans un était bien plus lamentable que la pire ruine du monde, à laquelle l’Irlandais trouverait certainement des charmes. Heureusement que ses fossiles étaient là, eux.
Il regrettait tout de même l’absence de son compagnon. Il pouvait tourner les talons, aller le retrouver, faire semblant de se mettre en colère, ou s’impatienter. Lui dire qu’il ne comprenait rien de ce qu’on lui racontait, et que personne ne bougeait. Il hésita. Mais il serra les poings Un peu de volonté, Caolan ! Il avait dit qu’il savait se débrouiller seul, qu’il n’avait pas besoin de lui. C’était vrai ! Il avait bien fait sans, avant de le rencontrer. Et même mieux, mais je n’irai pas placer ici de sous-entendus salaces qui expliquerait comment il avait pu faire mieux dans les espaces étroits des temples lorsqu’il devait se tordre dans tous les sens où faire preuve de souplesse, non non. Sûr de lui autant que le jeune homme pouvait l’être, le cœur gonflé de joie (oui, il approchait de ses ruines chéries), il pénétra dans le temple dont l’entrée avait été dégagée. Le premier. Il se retenait de sautiller comme un enfant.
Caolan guettait le moment où les ruines allaient lui parler, où le passé aller entrer en communion avec lui. Il avançait lentement, mais rien ne venait. Il pinça doucement les lèvres ; « tant pis », et s’approcha des murs, qu’il observait avec une attention et une patience qui le changeait en homme – littéralement. Adieu Caolan l’excité, bonjour l’Archéologue Grant ! Ses pas le menèrent le long d’un couloir, l’adrénaline parcourait ses veines. Un tombeau apparu, en haut d’une volée de marches ; il le fit ouvrir, s’avança et… Chuta en avant.
Il tombait – voilà. Dans le noir et l’obscurité. Son esprit tombait, jusqu’à cette même pièce. Cette foutue communion avec le passé qui arrivait quand il ne s’y attendait plus ! Il observa de ses yeux ébahit quelques belles prêtresses qui… Un hurlement. Arraché à sa contemplation, Caolan fit un bond en arrière, chercha son souffle. Et merde. On lui criait des trucs en Arabe ; mais sa tête lui faisait mal et sa vision restait floue. Ses accompagnateurs devaient penser qu’il avait fait un coma, rien de grave. Il but doucement l’eau qu’on lui offrait, avant qu’il ne tousse et recrache l’alcool qu’on avait voulu lui faire avaler. Et puis, alors que l’archéologue se remettait doucement de ses émotions, ce fut la panique, le chaos ; le mort qui sort de son tombeau.
Merde, merde, merde ! Caolan recula, manqua les marches et tomba sur les fesses. Quelque chose d’autre bougea. Son cœur battait beaucoup trop rapidement pour que cela soit sain ; une lourde porte était en train d’obstruer l’entrée, et le mort-vivant se tenait entre lui et son unique passage… En prenant son courage à deux mains, il s’élança vers le couloir, esquiva assez bien Momo la Momie, et roula sous la porte… Pour se retrouver bloqué dans le « couloir ». Son sang se glaça, et il chercha rapidement, à tâtons, un interrupteur, n’importe quoi… Jusqu’à se rendre compte que les murs se resserraient lentement sur lui. Son seul échappatoire était peut-être le trou dans la porte vers l’extérieur – pas vers la momie, heureusement – dans lequel il parvint à glisser son bras… Trop court. Trop court. Il allait crever ici, il allait mourir avec Momo, tout ça à cause de, de… Il jura dans un jargon irlandais, essayant frénétiquement de trouver la clé de sa liberté, quelque part de l’autre côté du trou.
Les jurons passaient les lèvres de Neil en cinq langages différents alors que le sable de la dune filait sous ses pieds, ralentissant sa progression. Caolan avait encore frappé, Neil n'était pas certain d'avoir besoin d'en savoir plus. Caolan, son cher Caolan était (encore) dans les ennuis jusqu'au cou. Des cris sortaient du tombeau, on l'appelait, et il accourait. Un scénario bien huilé, qui rythmait bien trop souvent son existence depuis qu'il avait croisé le chemin de Caolan. Avait-il décidé de se montrer encore plus imprudent que d'habitude pour forcer Neil à venir à sa suite ? Neil fit la moue; il n'espérait tout de même pas, mais l'archéologue en était capable. Putain, faites que ça soit pas juste un caprice de Caolan - il n'avait aucune envie qu'il lui arrive du mal, mais il n'avait pas la force de l'affronter après leur dernière conversation, d'avoir cette conversation.
Il écarta les autres hommes alors que leur babil et la vision qui s'étendaient sous ses yeux lui confirmaient ce qu'il supposait. Dans la crypte, l'ombre apportait une obscurité et une fraîcheur bienvenues, alors que la sueur collait sa chemise à ses épaules et que le fennec accroché à sa poitrine réchauffait son torse d'une manière presque intolérable. Mais la froidure souterraine ne faisait que raviver son mauvais pressentiment, son impression de déjà vu - il préférait de loin le contact du métal froid du revolver glissé à l'arrière de son pantalon, cadeau de Tom avant qu'il ne quitte la base militaire pour les "aventures de Caolan au pays des momies et autres joyeusetés". Il aimait bien observer Caolan travailler, se rappela-t-il avec un pincement au coeur. L'archéologue était aussi à l'aise avec les morts qu'il l'était avec les étrangers, et l'un et l'autre avaient les yeux qui brillaient face à leur discipline.
Des gens qui criaient, un tombeau ouvert... un mur qui se refermait, tombant lentement pour empêcher l'imprudent - aka. son petit ami - de sortir de ce qui devenait à présent son tombeau.
"- Cao....fuck !"
Le cri sorti de sa gorge juste avant que les réflexes ( et l'habitude, souffleront les mauvaises langues ) ne prennent le dessus. Neil se jeta au sol, au niveau de l'ouverture du mur qui se refermait et se saisit machinalement la main tendue de l'archéologue, ses doigts se refermant autour des siens, comme pour le tirer d'un abîme. Mais un trou n'était pas le problème, c'était justement d'ouverture que l'on manquait. Il devait chercher quoi là ? Le linguiste tourna la tête en tous sens, parcourant inscriptions et gravures du regard - sa connaissance des langues mortes était moins bonne que celle des langues anciennes, mais il pouvait reconnaître certains signes et mots. Inutile. Il n'y aurait pas de jolie flèche "cliquez ici pour annuler le terrible piège mortel dans lequel vous êtes tombés comme l'abruti qui sait pas toucher qu'avec les yeux que vous êtes." "-...Toi, tu restes là!"
Le fennec, coincé entre son torse et le sol rampait vers Caolan, et Neil attrapa le petit animal par la peau du cou pour l'empêcher de poursuivre sa reptation vers Caolan, et chercha à le ramener vers lui, malgré ses petites pattes qui griffaient le sol en soulevant un nuage de poussière. ...okay, ça commençait à faire beaucoup à tenir. Jurant à nouveau, Neil lâcha l'animal, qui courut de l'autre côté du mur. L'interprète s'en désintéressa pour appuyer, tirer, pousser à peu près tout ce qui passait à sa portée. Foutus pièges à la con dans ces foutus tombeaux de merde remplis de morts poussiéreux - une chance qu'il ne soit pas aussi allergique à la poussière d'os qu'aux fleurs tiens.
Grincement. Il avait tapé juste et un large sourire illumina le visage de Neil alors que le mur qui le séparait de Caolan sembla s'immobiliser et il serra la main qu'il tenait toujours, à bout de bras, avant de ramper vers la séparation, espérant que l'archéologue puisse ramper. Sinon. Pied de biche et bulldozer, le chantier avait tout ce qu'il fallait pour déloger l'irlandais de là - et comme il était enfermé, il n'aurait rien à y redire. Neil devrait penser à cette solution plus souvent. Mais avant qu'il puisse mettre son regard au niveau de celui de Caolan... Neil tomba.
Le sol sur lequel lui, Caolan, Momo et Fennec étaient allongés, s'inclina soudainement, se transformant en pente à partir du sarcophage, forçant tout ce petit monde à se rouler bouler dessus pendant une bonne centaine de mètre de pente très peu douce, jusqu'à atterrir en tas, en bas. Os, chair, poils, tout le monde en tas et lorsque Neil se redressa péniblement pour observer ce sur quoi il était tombé, faisant face aux orbites vide d'un crâne, il se laissa retomber aussi sec avec un soupire :