| Invité Invité | [ Warning : Ce post raconte pas mal de background de Phillys et est centré sur la découverte et l'acceptation de son homosexualité. Il sera question de lesbiennes, d'homophobie, de relations sexuelles et amoureuses entre femmes et (très légèrement) de harcèlement. Si ces sujets vous mettent mal à l'aise, ne lisez pas... Sinon profitez bien de mon apologie du saphisme. Toutes ressemblances avec des personnes réelles ou ayant existées seront purement fortuites. Ce poste ne revendique pas une représentation complètement réaliste de l'ensemble (et même d'une partie) de la communauté LGBT (U.S.A et mondiale). Également attention aux références à des comédies musicales, aux allergiques cela donne de l'urticaire.]Petite fille, fraîchement retirée du projet Arme X et découvrant le monde, Phillys n'a que rarement porté d'intérêt aux personnages de dessins animés. Si elle s'exprime à leur sujet c'est pour faire part de son admiration face à leurs compétences. En grandissant elle souhaite posséder l'esprit vif de Robin Hood, l'âme forte de Chang et le cœur pur de Milo. Elle veut la beauté d'Aurore et l'intelligence de Belle. Quand Chilali, en nattant ses cheveux de nuit, demande avec quel prince sa fille se marierait, Phillys hausse les épaules :
- Aucun, rétorque t-elle, mais j'aime beaucoup Alice du Pays des Merveilles.
Si la gamine perçoit le regard que ses parents échangent, elle n'en montre rien.
Pour fêter la fin de leur cursus et l'arrivée de l'été, le collège de Phillys organise un bal. Si a treize ans elle laisse encore à sa mère le soin de s'occuper de ses cheveux c'est parce qu'elle ne sais pas trop quoi en faire et d'elles deux, c'est Chilali que cela amuse le plus. Avec de longues et lisses mèches noirs et malgré son teint claire, Phillys pourrait presque avoir l'air de la fille de Chilali et Daniel. Les cheveux courts, les gens remarqueraient les incohérences. La forme du nez n'est pas la même et elle a une fossette sous la pommette. Car Jacy s'il est blond comme son père a le teint basané de sa mère. Mais tout ça n'embête pas Phillys. Elle sait que les Smith l'ont adopté. Elle se dit juste que si elle se coupe les cheveux les gens pourrait se douter de son secret. Contrairement à ce qu'elle a répondu à son grand-père ce n'est pas avec Sam Jones qu'elle veut danser. Le rêve de Phillys pour sa soirée a des cheveux bouclés couleur de blé, des lèvres pourpres, des yeux de chat. Elle s'appelle Bethany. Alors c'est le cœur battant qu'elle s'assoit, en blouse blanche et lissant sa robe à carreaux bleus, dans le pick-up de son frère. Quand celui-ci, tout fier d’exhiber sa voiture et son permis nouvellement acquit, vient la chercher à la sortie de la fête il est accueilli par la directrice. Dans le bureau, Phillys a les yeux rouges de larmes qu'elles n'ose pas verser. Ses genoux et ses paumes sont écorchés, sa robe déchirée et ses tresses ont été grossièrement coupées aux ciseaux. Ce qui choque le plus Jacy, toutefois, ce sont les lettres inscrites au marqueur sur le front de sa sœur chérie.
« Dyke »
L'été suivant et malgré l’insistance de Chilali pour parler de « ça » Phillys refuse toujours d'évoquer la soirée. La directrice du collège a exclu les garçons responsables et exprimé sa stupéfaction. Elle ne comprend pas ce qui leur a prit, les deux filles ne faisaient que danser. Mais c'est trop tard, Phillys et son squelette sont hors du placard et dommage pour elle car malheureusement, à Wichita, les gens ne sont pas aussi tolérants que Mrs Wheekomb. Elle ne dit rien toutefois, et c'est avec horreur que les Smith voient leur dernière s'éloigner d'eux à grande vitesse. Si Daniel essaie d'être objectif, se disant qu'à quatorze ans il est normal de ne plus être proche de sa fille qui se transforme en femme, il ne peut empêcher l'inquiétude de lui glacer les veines. Sa fille change, s'efface, bientôt ne sera plus qu'un point à l'horizon. Cela n'a pas d'importance, rassure t-il sa femme, du moment qu'elle va bien. Le fait est, ils le savent tous, Phillys n'est pas heureuse.
Après l'incident elle a donné ses robes à une œuvre de charité et adoptée une garçonne pour sa chevelure. Elle s'enferme dans sa chambre, construisant des gadgets et quoi qu'en pensent ses parents, ils sont déjà surchargés avec la logistique défaillante du ranch, pour gérer la crise que traverse l'adolescente. Pour une raison qu'ils ignorent le compteur électrique a des bogues. Les plombs ne cessent de sauter. Les rumeurs vont vite, et Phillys rentre souvent couvertes de bleues du lycée. Et si parfois, alors qu'elle se laisse aller aux larmes dans le sanctuaire de sa chambre, elle entend Jacy l'oreille collée à la porte lui murmurer des encouragements, elle n'en dit rien. Phillys est devenue le fantôme de Smith and Bly Tunwan. Si elle vit ici, ses habitants ne l'a perçoivent plus qu'à peine et peu importe qu'ils le regrettent, il est peut-être déjà trop tard.
Alors quelle n'est pas la surprise de Chilali, quand elle investit la grange ce matin là, quelques temps avant l'aurore, d'y trouver Phillys. La jument de sa mère déjà préparée, la jeune fille panse doucement Logan Roger, le jeune apaloosa dont sa famille Comanche lui a fait cadeau. Tout en brossant l'animal, elle chuchote à son oreille. Le cœur de la native se serre en songeant que ce cheval en sait plus sur sa fille qu'elle même. Elle monte en selle. Entendant Phillys faire de même, elle démarre son tour du domaine. Dans le ciel encore sombre, les deux Smith-Bly s'élancent. Après plusieurs hectares parcourus, elles s'arrêtent devant le troupeau et laissent les chevaux vagabonder au milieu des 300 têtes. Alors que le soleil se lève, Chilali remonte. Phillys est à côté d'elle, resserrant la sangle. Les rayons jouent sur son visage et laissent entrevoir les cernes foncés qui se sont creusés sous ses yeux. Elle est pâle, peut-être trop et elle l'est encore davantage quand elle lève le regard vers Chilali et dit, a peine plus haut qu'un murmure :
- Maman ?
Et c'est comme si la poitrine de la Comanche explosait en milliers de pièces. Elle revoit dans ces iris couleur de ciel, comme dans un rêve, la fillette détruite au-delà du réel que son beau- père lui avait fourré dans les bras en disant : « C'est ta fille maintenant, elle s'appelle Phillys. ». Et c'était vite devenu sa réalité. Et elle pensait avoir réussie. Elle avait remplie son rôle. Les six années qui avaient suivit elle s'était assurée que sa fille ne manque de rien et que rien ne l'effraie. Mais le bal avait tout changée. Chilali avait échouée. Elle en était certaine, comment expliquer sinon l'expression terrifiée sur le visage de son enfant ? Le souffle bloquée elle répond toutefois, le visage tourné vers l'horizon.
- Oui mon soleil ?
Elle entend un hoquet, comme si Phillys retenait un sanglot.
- Maman. Je dois te dire. Je…La voix de sa fille se brise. Maman, je suis lesbienne.
Chilali descend de son cheval, approche à pas lents et enserre l'adolescente dans ses bras. Les épaules de Phillys se secouent en une rythmique désaxée et ses lèvres laissent échapper des sons d'instruments désaccordées. Mère et fille tombent à genoux. La rosée sur l'herbe déposée ne tardant pas à mouiller leurs jeans. Berçant sa fille d'avant en arrière, Chilali la baigne dans un flot de tendresse, ses paroles allant et venant comme des vagues.
- Je sais, je sais, tout va bien, tout va bien. Là. Ça va aller. Je t'aime Phillys. Tout va bien, ma joie, mon oiseau bleu, ma fille-nuage, ma Dorothy… Mon arc-en-ciel. A cette occurrence, un son étrange perce au milieu des sanglots. Un éclat de rire, brillant, fort et un peu maladroit, comme une fleur perce la neige, comme un poulain qui fait ses premiers pas, comme une inspiration prise après une longue apnée. Un éclat de rire. Le premier de Phillys en un an. Et Chilali songe, qu'avec le cri poussé par Jacy à sa naissance, il s'agissait du plus beau son du monde.
Quitter Wichita Hight fut une libération pour Phillys. Laisser le Kansas derrière elle, en revanche… Elle regrettait que le gain de capacités mutantes soit synonyme d'éloignement. Elle venait tout juste de retrouver sa famille. Mais la blessure qu'elle avait infligée à son frère, même accidentelle, n'était pas à prendre à la légère. Que se produirait-il la prochaine fois que des lycéens bêtes mais un peu trop zélés se mettraient en tête de la brutaliser ? Après tout, elle ne maîtrisait pas ces pouvoirs. Non ! Pas ces pouvoirs. Ses pouvoirs, les siens, le résultat d'une anomalie viable, un saut génétique, une marque de fabrication purement et complètement unique. Cela faisait parti d'elle.
En dépit de tout, c'était peut-être mieux pour tout le monde. La bombe mutante à quelques semaines à peine du coming-out, disons qu'elle se méfiait des retombées atomiques… Savoir cela n'empêchait pas la nostalgie. Assise, les bras entourant ses genoux, sur son large appuie fenêtre, Phillys regardait la nuit tombée sur le parc. L'Institut du professeur Xavier était vraiment magnifique. Aux yeux de la jeune fille il manquait pourtant quelquechose. L'année scolaire n'ayant pas encore débutée, les murs de l'établissement étaient encore relativement vides. En dehors bien sûr des professeurs, des jeunes révélés et de ceux qui, comme Logan, faisaient parti des murs ou n'avaient nul part où aller. L'adolescente savait qu'on l'avait mise dans une chambre isolée pour lui laisser le temps de s'habituer. Ses parents avaient certainement ennuyés le Professeur, remplissant son esprit supérieur des événements de l'année passée. Phillys laissa sa tête frapper contre le mur, un long soupir lui échappa, emplissant le silence de sa chambre vide. Elle se sentait comme engourdie, son corps entier frigorifié, et son âme, en proie aux vagues, voguant au dessus d'elle à mille lieux de tout cela. Ses yeux piquaient. Sa gorge lui faisait mal. Fichu New-York.
- Hé ! Tu vas bien ?
L'appel fit sursauter la jeune mutante. Elle se tourna vers la porte, restée ouverte, pour faire sentir au nouveau venu à quel point il était malvenu de rentrer sans frapper. Il se tenait encore dans l'embrasure et elle ouvrit la bouche pour lui répondre. Mais son exclamation n'atteint jamais ses lèvres. Elle secoua la tête. Non, elle n'allait pas bien. Sa vision se brouillait, elle ignorait si c'était du aux larmes ou un soudain vertige.
- Je rentre d'accord. Entendit-elle. Ça va s'arranger, tu vas voir. Reste pas dans le noir. Je vais te faire visiter. On a un super home cinéma dans la salle de rétroprojection et je viens justement de recevoir le coffret des trois saisons originales de Star Trek. Ça et une glace aux spéculoos, c'est le meilleur remède au mal du pays.
Elle n'apprit pas ce soir là comment il avait si bien su ce qu'elle traversait, ni comment il avait tout de suite trouvé moyen de la remettre d'aplomb. Ce qu'elle comprit immédiatement, en revanche, c'est que Robert Drake deviendrait quelqu'un de très important pour elle.
De New-York à Wichita les Starbuck sont et restent les repères de Phillys. Elle n'a que seize ans mais cela fait deux ans qu'elle enchaîne les insomnies. Elle a toujours eu des troubles du sommeils, mais cette fois c'est différent. Cela pose plus de problèmes à l'Institut avec le couvre-feu et le sommeil nécessité par les plus jeunes étudiants ; mais une fois n'est pas coutume -sans rire- c'est encore Bobby qui la sauve. Et si le sarcasme lui sied la plupart du temps, il n'a pas sa place dans un café 24h/24, perdu dans l'Indiana. Au plus sombre de la nuit, attendant son bus-relais pour faire New-York/Kansas City.
De l'autre côté de la vitrine, le ciel est noir comme du velours. La brise est un peu fraîche pour la saison, mais le cinnamon latte la garde à la bonne température. Phillys consulte sa montre avec placidité : trois heures, horaires de la côte Est. Soupir d'ennui, les heures sont longues avant l'arrivée de son véhicule, et encore plus nombreuses sont celles qui précèdent son retour au ranch. Le Kansas manque à Phillys. L'air, dans les plaines, n'a pas la même saveur. En bonne synesthète elle y associe des couleurs chaudes et le gris que prennent les plaines l'été avant l'orage. La musique ? Des harmonies de guitares sèches, folk peut-être, un tang un peu lancinant et un son distant d'harmonica. Derrière les accords des colons résonnent des instruments plus tribaux et à travers eux, les chants des Comanches et le tam-tam régulier de leurs cœurs battants. Le galops des mustangs résonne dans le silence de la prairie. L'herbe étouffe le bruit des bottes, la végétation pousse sur le béton. Le Kansas sera toujours libre. Sur cette pensée idéaliste l'adolescente s'étire. Dans le silence du café le claquement de ses vertèbres sonnent. Elle se retient de bailler. Sortant un livre, la Smith-Bly se résigne à faire ses devoirs. Le lycée est plus ennuyeux que jamais, heureusement elle n'y passe que peu de temps, suivant déjà un cursus avancé à l'Institut. Avec un peu de chance, elle devrait passer ses examens à son retour du ranch et débuter le M.I.T à distance. Sa candidature a déjà été acceptée, c'est dans la poche. D'un air détendu, un peu supérieur, elle chausse ses lunettes et plonge le nez dans son livre. Les minutes semblent s'étirer dans le Starbuck vide. Le tic-tac de l'horloge, le crépitement de l'ampoule, le claquement régulier des cafetières forment un homogène fond sonore propice à l'étude. Phillys s'oublie. Un glissement de tissu lui fait lever la tête. La responsable-manager s'est assise en face d'elle. L'adolescente la scrute par dessus ses lunettes. Elle est asiatique, ses longs cheveux caramels retombent en tresse lâche sur son épaule. Ses yeux sont sombres et sous le ridicule tablier d'uniforme, son chemisier blanc laisse apparaître un tatouage en watercolor lové sur sa clavicule.
« - Hey. Murmure-t-elle en se penchant. - Bonsoir. Répond Phillys. Sa voix tremble, elle ne sait pourquoi sa gorge est soudain sèche.
Ses pupilles volent du visage de l'inconnu, le badge épinglé sur son cœur dit Jeena, aux alentours. Son esprit analyse et calcule, trie les détails. Arrêt sur image : l'encart sur la porte affiche ouvert. Ce qui signifie que le Starbuck annonce fermé pour les visiteurs. Elle se lève, soudain gênée. Elle a du mal lire, c'est pas un 24/24. Elle doit partir.Un geste de Jeena l'arrête.
- Attend !
La Smith se rassoit. Dubitative. Elle a fermé et posé son livre. La fille joue avec sa natte, regarde Phillys sur le côté.
- C'est juste… Reprend-t-elle à mi-voix, j'ai vu les pin's LGBTs friendly sur ton sac et je me suis dit qu'on pouvait… discuter ?
Son cerveau fait un retour. Zoom. L'aquarelle : remarquable travail sur cette peau d'albâtre où tranche le parme des violettes. Phillys sourit. Et quand Jeena s'assoit à côté d'elle ce n'est pas pour parler. La serveuse lui retire ses lunettes, se penche sur elle, soudain s'arrête. Commence à s'écarter.
- Je dois baisser les stores. S'explique t-elle dans un ton d'excuse.
Phillys se mord la lèvre. Elle ne sait si cela vaut le coup mais elle prend le pari. Elle s'approche Jeena. Un air presque triomphant sur son visage, elle glisse les bras autour du cou de la fille.
- T'en fais pas. Lui murmure-t-elle avec un confiance qu'elle n'a pas. Je suis un peu magicienne.
Un claquement de doigt, une pensée et les stores descendent d'eux-mêmes en crissant. Jenna la regarde. Sa bouche ouverte par la surprise laisse voir une pointe d'acier sur la langue. Phillys frissonne.
- Magicienne.. Hum ? » Répond la serveuse en se penchant vers elle.
Et alors que leurs souffles se mélangent, le corps prit entre une banquette de cuir et la poitrine d'une fille, les heures qui la séparent du Kansas lui apparaissent soudain bien courtes.
Depuis sa rencontre avec Jeena, le monde de Phillys a radicalement changé. Comme si précédemment elle n'en voyait qu'une partie. Comme la petite Dorothy qui voyage du Kansas gris aux milles nuances d'Oz. Phillys se sent les couleurs de l'arc-en-ciel. Son monde est bleu et doré. Doré comme les blés autour d'elle et la longue chevelure de Bethany, bleu comme les yeux de la fille et le ciel au dessus de leurs corps enlacés. Elle a beau répéter qu'elle est fière de son homosexualité, qu'elle est sorti du placard, qu'elle n'y retournera jamais et qu'elle ne se cachera pas : ses beaux discours sont annihilés. Les gestes de Bethany, sa peau bronzée par l'exercice et son corps de cheerleader qui se presse contre le sien ont tôt fait de réduire ses protestations à néant. Holy Hell ! La voilà semblable à un de ses ordinateurs quantique en sur-régime. Sa mémoire vive est saturée, la rame est déficiente et le processeur ne tient plus le rythme, les rouages bien huilés de la machine Phillys déraille. Bethany c'est un peu son ingrédient chimique X, n'en déplaise aux Super Nanas et la mutante décrocherai la lune pour elle. Sa voix est le seul son qu'elle entend, son rire est sa musique, son odeur et ses lèvres sont le pain et l'eau dont elle a besoin : Le monde de Phillys Smith est Bethany Millers. Et elle en a rêvé pendant si longtemps. De ces choses simples. De n'être qu'une adolescente. Pas un prodige, pas une mutante, pas une lesbienne. Juste une gamine heureuse et amoureuse. Quelle importance alors, que Bethany prétende être hétéro et se pavane dans les couloirs de l'école au bras de cet imbécile de Sam Jones et sa tête ridicule de Quaterback ? Quelle importance, puisque derrière les portes closes, quand la nuit tombe, dans le foin fraîchement coupé ou sous l'ombre des blés ce sont ses lèvres que Bethany embrasse et son corps qu'elle révère ? Les mains de la pom-pom girl trouvent leurs chemins sous le t-shirt de Phillys, caressant ses côtes avec lenteur. Le souffle frais de Bethany se manifeste près de son oreille. Quand ses lèvres se sont-elle déplacées ? Et soudain la voix douce qui lui murmure :
- Je suis morgane de toi !
Car Bethany n'est pas seulement belle, personne ne l'est, elle aime juste à le faire croire. En vérité elle est douée en chimie et adore le français, et est peut-être la seule junior de Wichita Hight qui a ses chances de quitter le Kansas. Parfois allongée dans l'herbe avec Phillys jusqu'à tard, elle raconte son rêve d'entrer à Standford ou peut-être un jour de rejoindre Phi au M.I.T ? La gamine ne sait pas si le Massachusetts est plus acceptant que le Kansas en ce qui concerne les droits mutants ou L.G.B.T mais elle se laisse aller à ses fantasmes : partager une chambre d'université avec cette jolie fille et adapter le hardware aux vrais possibilités données par le software. Elle voudrait que cela dure toujours.
- Ça ne va pas princesse ? Demande Daniel doucement, en se penchant sur sa fille.
Phillys est accoudée à une barrière, le corps bandé dans une position qui siérait tout à fait à un cow-boy mais que bien des politiciens « bien pensants » du Tea party jugeraient inappropriée pour une demoiselle du sud. Son chapeau à larges bords cache en partie son visage, mais il peut dire qu'elle a pleuré. Des traces de larmes brillent encore sur ses joues. Le haut soleil y fait jouer sa lumière. Elle ne dit rien. Il soupire. Daniel regarde l'adolescente. Sa fille. Même neuf ans après l'arrivée de Phillys au ranch ça lui fait toujours comme un choc. Sa fille. Quelle drôle de créature est Phillys Smith, c'est vrai. Et durant un temps il s'en est fallu de peu qu'elle ne devienne une étrangère. Mais comme un tissu déchiré peut-être recousu, leur relation s'était réparée. Étant une fille devenant une femme, et une adolescente lesbienne découvrant la sexualité l'on aurait pu croire que Daniel Smith et sa fille ne deviendraient jamais proches. Loin s'en faut. Elle n'est pas l'enfant biologique de Daniel, néanmoins elle regarde le Kansas comme si elle voulait porter cette terre toute entière. Protéger ce domaine, ses plaines et ses chevaux. Daniel n'est pas comme ça. Il a grandit dans ce hara, longtemps avant que Bly ne rejoigne Smith sur l'enseigne. Il ne voit la prairie et les mustangs que pour les dessiner. Et même s'il apprécie la country, il adore aussi RENT, Les Mis et West-Side Story. C'est lui qui a conseillé Wicked à sa fille, car il sait comme elle aime le Magicien d'Oz. Et quand parfois ils sont seuls dans la cuisine familiale ou dans le jardin de Daniel, on peut les prendre à chanter « Popular » ou « For Good » a mi-voix, car ils ont un penchant pour Broadway. Daniel est peintre, il a grandit au Kansas mais ne sais pas tirer au pistolet. Son père plaisante parfois en disant qu'il n'a réussie que trois choses : son ménage, ses enfants et son potager. Il est rêveur, peut-être un peu trop ; c'est lui qui a apprit à Phillys à jouer de la guitare et du piano. Sa femme, c'est vrai, est diplômée d'agriculture, palefrenière et elle sait y faire avec les bêtes. On ne croirait pas, comme ça, qu'elle a grandit dans une réserve à la population rongée par le chômage et l'alcoolisme. Il regarde sa fille en coin. Avec ses yeux clairs et ses cheveux sombres ont pourrait vraiment penser qu'elle est belle et bien leur progéniture. Pourtant à douze ans elle lève les yeux de son livre de chimie, vers Daniel en train de préparer du cheesecake en fredonnant « Nowadays » et demande :
« - Pop' ?
- Oui, mon sucre d'orge ? Daniel est un papa gâteau et il ne s'en cache pas.
- Quand est-ce que Maman et toi vous compter me le dire ?
- Te dire quoi, ma marguerite ? Répond-t-il en versant la pâte au parfum de vanille dans le moule.
- Que je suis adoptée. »
Et le choc fut si fort qu'il en lâchât sa cuillère en bois.
Il est calme d'habitude mais à l'instar de tout amateur de Musical, comme le dit Chilali, il est un Dramatique. Que voulez-vous, il a une âme d'artiste. Alors, certes, il lui est simple tandis qu'ils regardent « Évita » ou « Matrix » de parler à Phillys. Dès que l'on sort du cadre de la fiction, arrivé à la conversation entre deux personnes, réelles, il a des difficultés. Et le fait qu'elle soit- quelques fois- si semblable à son père ou à sa femme n'arrange pas les choses. Mais elle est blessée. Et même s'il a ses insécurités il est de son devoir de père de faire un pas vers elle.
- Où est passée ta camarade ? La pom-pom girl ? Tente Daniel. Et il se sent fière, quelle approche en douceur. Il est un agent en mission, sauver le soldat Phillys.
- Bethany ? Ce n'est pas ma camarade. Répond-t-elle après un temps, l'air sombre.
Aïe, songe le père partit comme ça, il vaudrait peut-être mieux annuler l'opération. Et envoyer une autre équipe. Ou simplement battre en retraite. Mais l'adolescente pose sur lui ses grands yeux de ciel et ajoute avec un sourire à peine un peu plus triste :
- C'est ma petite-amie, enfin c'était. Elle m'a jeté.
Il l'a regarde. Grimace légèrement.
- Ouep, je sais ce que ça fait. Avant ta mère, elle sont un certain nombre à m'avoir brisé le cœur. Je n'étais pas vraiment ce à quoi elles s'attendaient. Qu'est-ce qui clochait avec Bethany ?
Le soleil baigne son visage, son corps toute entier. Ses bras, sous les manches retroussées de sa chemise à carreaux, commencent à bronzer. Avec son teint pâle et malgré l'habitude, il s'inquiète que l'astre ne l'a brûle. Il souhaiterait pouvoir la prendre en peinture.
- Bethany ne voulait pas que les autres le sachent. Et j'en ai eu assez d'être le secret honteux d'une cheerleader qui ne s'assume pas. Faut croire qu'elle ne m'aime pas assez pour faire son coming-out et que je suis trop orgueilleuse pour lui pardonner.
Phillys fixe l'horizon sans ciller, ses lèvres forment une mince ligne sur son visage et elle se tient droite face au jour. Daniel pose un instant sa main sur son épaule.
- Tu sais qui tu es Phillys. Mais tout le monde n'a pas cette certitude ni le courage de s'accepter comme tu le fais. Jusqu'à que tu rencontre la bonne personne, tu vas devoir t'habituer à marcher seule.
-Tel Solzhenitsyn ? Demande t-elle. Et son visage exprime tant de vulnérabilité en cet instant que Daniel sent son cœur se serrer. Comme sa main sur sa fille.
- Tel Alexandr, oui. Répond-t-il. Il s'abstint de prononcer le nom de l'auteur russe, avec ses relents d'accent Midwest ça ferait tâche. Tu devrais aller jeter un coup d’œil au niveau du garage. Ajoute t-il. Jacy semble avoir des difficultés avec le tracteur.
Elle soupire. Laisse tomber la tête sur sa main une seconde, lève vers lui ses yeux profondément bleues. Il sourit.
- N'oublie pas que les amis de ta mère arrivent ce soir. Depuis le Montana. Lui dit-il tandis qu'elle s'éloigne. Elle redresse son fedora d'une pichenette, esquisse un sourire mutin et s'éloigne à grandes enjambées. Avant que sa fille ne disparaissent au milieu des hautes herbes, il la rappelle.
- Phillys !
Elle se retourne. La chemise de bûcheron de son frère vole autour d'elle comme une cape. Daniel avale sa salive.
- Je suis navré que tu ai rompu avec ta copine ! Crie t-il, les mains autour de sa bouche pour porter le son.
Elle lance les siennes en l'air semblait lui dire « Tu n'y est pour rien », « Moi aussi ! » ou « Que veut-tu que cela me fasse ? ». L'adolescente se détourne et lui adresse un dernier geste : « J'irai bien ».
Et alors qu'il l'observe, tantôt dans la soirée, construire une étrange amitié avec la petite Eilis, il ne peut s'empêcher de la croire.
Le Minnesota n'est pas comme le Kansas. Minneapolis n'a rien de New-York. Il y fait froid et quoi qu'en disent les natifs de Seattle, il pleut presque autant au Minnesota que dans l’État de Washington. Après SuperMan, et Bruce Wayne, Phillys joue à présent une Kyle XY au féminin, exilée loin de sa prairie natale et de Gotham où elle à grandit. Elle a besoin, peut-être, de s'éloigner. Après l'obtention d'un diplôme au M.I.T, elle relève un nouveau défi en s'inscrivant en sciences sociales. Loin des yeux, c'est vrai, mais elle n'oublie pas. Si elle vient à Minneapolis, c'est pour les cours concernant les Mythes Amérindiens.
Même en territoire Dakotas, Phillys, en Comanche d'adoption, ne se démonte pas. Quoi de mieux pour préparer sa thèse que d'assister au festival : Le seul, l'unique, LE Burning Man ? Un éventail de cultures natives sur fond de « chamanisme » aux couleurs amérindiennes. Et elle exagère à peine. Les flammes des feux de joie montent haut dans l'air du soir, faisant la course et la coure aux étoiles. En regardant les étincelles crépiter dans l'air, elle a une pensée émue pour l'Institut Xavier. La côte Est n'est pas si loin, mais l'école semble appartenir à un autre plan géographique et temporel. Cela ne fait pourtant qu'un mois qu'elle l'a quitté. La mutante songe qu'elle devrait téléphoner à Iceberg, lui dire qu'elle va bien. Qui sait ? De l'apprendre, cela réchauffera peut-être son cœur. La lumière renvoyée par les braises joue sur le revers du visage de Phillys, teintant sa pommette de chaudes couleurs. Son profil droit est peint de nuit, la faisant ressembler à l'une de ces vieilles gravures présentant les Indiens sur les sentiers de la Guerre. Une silhouette massive plonge la jeune fille dans l'ombre. Le feu pare les cheveux de l'inconnu de reflets sanglants et ses iris se détachent -d'un blanc éclatant- sur sa forme sombre. Un poids s'abat soudain sur les épaules de Phillys, manquant de la jeter en arrière. Ses genoux fléchissent sous les paluches inquisitrices.
« - Hé mignonne, t'es venu voir la faune locale ?
L'instant parait se suspendre, flotter. L'esprit supérieur de la mutante s'arrête analysant la situation. Un goût acre se répandit dans sa bouche. Ses lèvres formant en silence les mots prononcés. « Mignonne ? » « Faune » ? « Tu » ?. Elle comprend les termes d'un point de vue sémantique, mais l'ensemble ne fait pas sens. Des alarmes lointaines lui semblent retentir, étrange écho, avertissement oublié ou souvenir perdu. Elle penche la tête sur le côté, ressemblant soudain à un personnage de son roman favori. On la croirait prête à parler de corbeau, de bureau et de darjeeling.
- Plait-il ? Demande t-elle d'un air un peu stupéfait. La faune locale ? Nous sommes au Minnesota au centre du territoire dit Sioux, un terme générique recouvrant plus d'une centaine de tribus qui ne partagent pas les mêmes dialectes, mœurs et traditions. On peux difficilement comparer ces sphères culturelles au règne animal !
Elle ignore volontairement la malhabile tentative d'approche, à son discours il va se lasser. Il va se lasser, enlever ses mains de ses épaules et la laisser partir.
- Ah ouai ?! T'es ce genre de fille, remarque j'aurai du m'en douter avec ta coupe de Lesbos. Mais t'en fais pas poupée je vais vite nous trouver d'autres sujets de conversation. Ça te dirait d'aller boire un verre ?
Sa voix se bloque dans sa gorge, les vannes d'oxygènes paraissent s'être closes. Elle voudrait lui répondre qu'elle n'est pas intéressée, qu'il n'y a pas que sa coupe qui est lesbienne, et que même hétéro elle ne sortirait pas pour rejoindre un type dans son genre. Non ! Dans l'absolu, elle n'a que dix-huit ans et l'alcool ne lui est pas permit. Mais ce qui la paralyse, c'est cette main qui descend le long de son bras pour se loger sur sa hanche. Son cœur bat vite, beaucoup trop. Son esprit devrait déclarer l'état d'urgence avant que ses pouvoirs fassent parler d'eux. Et ça empire quand elle sent la main du quarterback se glisser sous son débardeur pour caresser son ventre. Sa main se serre sur son épaule. Le cœur de Phillys s'arrête. « Fais quelque chose » se sermonne t-elle, mais elle est statufiée. De l'électricité statique commence à claquer autour d'elle comme des bulles de chewing-gum que l'on éclate. Il faut qu'elle réagisse, il faut qu'elle se calme. Le monde lui apparaît floue.
Soudainement le garçon est arraché d'elle ; une nouvelle silhouette s'interposant entre les leurs.
- On peut savoir ce que tu faisais mec ?
La forme de l'inconnu se découpe à la lumière des flammes aux cotés de celle du quarterback. Un jeune homme, natif, ses bras sont lourdement tatoués et sa tête est coiffée d'une iroquoise. Il est plus grand que la mutante, mais moins bien-bâti que le footballer qui l'a harcelait. Sa posture est agressive, il est campé sur ses positions prêt à sauter sur l'autre garçon. Alors que l'imbécile tente de répliquer par la force il est arrêté en plein mouvement par deux autres arrivants. Des amis de l’Iroquois. Dommage pour lui, songe Phillys, pas désolée pour un sou. Anesthésiée, elle regarde la scène se dérouler devant elle. Le nouveau venu est du même acabit que l'idiot et peut-être aussi quarterback, il porte un T-Shirt à motif tribaux figurant un chat sauvage et une veste en denim complètement délavée probablement vintage. Caucasien, mais la mutante parierai l'avoir entendu jurer en Lakota alors qu'il sépare les bagarreurs et aide l'Iroquois pour descendre verbalement l'attaquant. Le dernier membre du trio distrait Phillys des événements. Une fille, native également, ses longs cheveux vert coiffés en lourdes nattes retombent sur sa poitrine. Ses yeux sont cachés par des lunettes rondes et toutes aussi vertes. Elle s'avance vers elle, dans un déhanché élégant. La hacker ne sait pas comment détacher ses prunelles d'elle. Arrivée à sa hauteur l'indienne la regarde par dessus ses verres d'émeraudes.
- Tu vas bien Corky ? Demande t-elle.
A travers les larmes qui coulent sur ses pommettes, Phillys sourit. La tension semble se dissiper et elle réplique, usant de la même référence.
- Ça va maintenant. Merci et sacré sauvetage Violet !
« Violet » rit, balançant la tête en arrière. Le Minnesota n'apparaît plus si froid soudainement. A son cou étincelle un collier en œil de lynx, ambre et nacre. La nuit est fraîche et brille dans la lumière de mille soleils aux lointaines galaxies. Phillys esquisse un rictus. Sa joie soudaine est coupée dans son élan par des éclats de voix. Son sourire se transforme en grimace, un masque glacé recouvre son visage quand son esprit saisit le sens des paroles.
- C' pas du harcèlement, elle l'a cherché. Personne ne s'habille comme ça si ce n'est pour se faire remarquer. Braille l'abruti. Un coup sec l'interrompt. Le bruit mat de la peau heurtant la peau. N'osant regarder Phillys se dit que l'un des acolytes de sa sauveuse a finit par perdre son sang-froid. Elle lève finalement les yeux, surprenant un étrange tableau. Violet a le bras encore tendu, le poignet tordu dans un mouvement à faire pâlir d'envie le Jean-Baptiste de Da Vinci Leonard. Dans l'esprit de la mutante, ce sont les mêmes Ténèbres qui environnent ces deux scènes. Les yeux de la native sont plein de fureur et au-delà, de mépris. Elle laisse son membre retomber mollement, et esquisse une moue narquoise. Elle se tourne vers Phillys.
- Tu sais ce que je déteste plus qu'un quarterback, cis', blanc, hétéro Corky ? Demande t-elle jaugeant une dernière fois le type.
Désarçonnée Phillys lui répond dans une voix si petite qu'elle ne paraît pas la sienne.
- Quoi donc Violet ?
- Qu'il se permette de culpabiliser une fille et s'en serve d'excuse pour justifier son manque d'humanité. Murmure-t-elle en passant son bras brun autour des épaules de Phillys. Son vernis couleur écume luisant sur le cuir sombre de la Kansan.
- Hey Jackass ! Clame t-elle en l'éloignant. Essaye le consentement la prochaine fois ; ça pourrait te surprendre ce qu'on obtient d'une femme quand elle le veux vraiment. Il est à vous les garçons.
Et comme si rien ne s'était produit, elles abandonnèrent le sportif à son sort. Phillys se laisse entraîner ; la terre ici est âgée, autant qu'à Wichita songe-t-elle. Violet l'emmène, elle est sa Valérie, même sans les cheveux roux. Les tribus et les peuples défilent devant elles, en kaléidoscopes éclatées. Et alors qu'elles regardent les astres brûler dans la vielle décapotable bleue de la fille, Phillys apprend enfin son nom :
- C'est Azur, sister ! Réplique la fille. Et toi Corky ?
- Phillys Joy Smith.
- Et qu'est-ce qu'une Smith, viens faire au Burning Man ? S'enquière l'azure indienne, mâchant sa gomme, nonchalante. Ses lèvres aussi sont bleuies par le gloss et la hacker laisse le silence flotter un instant, perdue dans cette vision.
- Et bien, il se trouve que ma mère est Comanche, une Bly.
Elles discutent durant des heures encore, le ciel s'éclaircissant lentement à l'horizon. Derrière Azur, Phillys voit le jour. Elle, elle est encore dans la nuit. Mais cette fille la fait rire, son premier printemps depuis Bethany. Elle tente de se garder, pas le bon jour pour être mordue de quelqu'un. Ne pense pas à Miller. Mais plus elles parlent et moins la silhouette de son amour partie est lisible, sa douleur n'est que floue qui devient de plus en plus indistinct avec les minutes qui passent. Elle regarde au dessus d'elle, le coin de ses lèvres se relève.
- Il parait que le temps soigne les blessures. Soupire t-elle.
La main gauche d'Azur passe dans ses cheveux de jais, louvoyant pour aller masser sa nuque.
- Tais-toi donc Corky et embrasse moi. S'amuse l'autre fille.
Et quand leurs langues se rencontrent, Phillys songe -mutine- « Yep, définitivement lesbienne ». Et quand la main droite de la native voyage entre ses cuisses, elle ne pense plus à rien.
A force de regarder des séries de types Star Trek, Doctor Who ou Buffy The Vampire Slayer (et elle ne s'est certainement pas tapée l'intégrale de ce show uniquement en raison du béguin qu'elle avait sur Alyson Hannigan, non !), Phillys s'est résolue au fait qu'il y ai des points fixes dans le temps. Des crochets entre les quatre dimensions qui permettent leur coexistence, leur concomitance et l'épanouissement en fractales du Chaos. C'est en tout cas ce dont ils débâtent avec son directeur -Ian Malcolm- quand ils établissent le programme pour sa thèse. Et si il y'a des points fixes dans le temps, il en est de même pour les lieux. New-York City est un de cette sorte pour Phillys.
« […] That anywhere else you could possibly go after New-York would be a pleasure cruise ! »
Elle n'a pas profité de Minneapolis bien longtemps. Ce n'est pas si grave, minaude -t-elle mentalement, bien trop pluvieux comme coin. En deux cliques et trois lignes de commandes, elle s'est retrouvée dans les ennuis jusqu'au cou. Au revoir la bourse pour les mythes amérindiens et bonjours NYU ! Comment aurait-elle pu savoir que cette société servait d'écran au S.H.I.E.L.D, hum ? Le seul avantage dans ses mésaventures ? Elle avait gagné un job' et revenant là ou tout avait commencé, pu retombé sur ses pieds efficacement. Avec plus ou moins de grâce cependant. Elle n'apprit pas cependant comment le Professeur avait su qu'elle était de retour, mais loin de son esprit l'idée de questionner les sources de l'homme. Mais il avait eu besoin d'un service, et elle lui devait bien ça. Voilà comment elle l'expliquerai aux policiers quand elle devrai reporter le meurtre d'un des trente gamins dont Robert et elle avait la charge en cette après midi d'automne. Assise dans l'un des sièges inconfortables d'une salle de cinéma sur-bondée de la 5ième avenue pour voir le dernier film animé mainstream des studios Disney, elle ne pouvait s'empêcher d'y songer. La courte garde à vue et l’immonde tenue Orange. On avait beau qualifier cela le nouveau noir, rien ne valait à ses yeux une bonne paire de Minelli ou New Rock et une veste signée Westwood. Après ça ils n'auraient plus, Iceberg et elle, qu'à jouer une version mutante et gay du « Cell Block Tango ». Elle sourit en imaginant Bobby dans une version masculine sexy et bottes de cuir (garantie sans chapeau melon) du musical. Avec l'expression grognon que le glaçon affichait en cette heure cela se marierai à souhait, à n'en pas douter.
« - Comment s'appelle le film déjà ? Glisse t-elle à son meilleur ami alors que la salle s'obscurcit pour permettre à l'écran d'afficher sa ribambelle de bandes-annonces et autres trailers inconsistants.
Bobby soupire, la tête entre les mains et les coudes sur les genoux dans une vaillante tentative de regagner calme et patience. Il lève vers elle un regard un peu vide, annonce avec une figure neutre au possible et le ton le plus plat qu'il soit :
- Frozen. »
La Kansan éclate bruyamment de rire, suscitant réaction de ses voisins de rangées. Drake pousse un son plaintif, semblable à un gémissement. Durant un instant, elle le plaindrait presque.
Quand les crédits finissent de défiler, elle ne rit plus du tout. Trop sensible pour l'image caustique dont elle se pare ; elle essuie en tapinois les larmes qui ont roulées sur ses joues. Sortie de la salle et rassemblant les plus jeunes, elle échange un regard avec Icebobby. Celui qu'il lui renvoie au dessus de la marée de têtes blondes est éloquent. Ils ont tous deux bien comprit dont parlait réellement ce film, et il n'était pas une seconde question de Reine des neiges. Mais bien de coming-out. Les gamins, bien sûre, n'ont pas encore les armes pour la seconde lecture, aussi X-traordinaire soient-ils et ils en profitent pour asticoter leur accompagnateur avec des « Let it go » et autres plaisanteries. Alors qu'ils repartent vers leurs bus, Bobby se rapproche de Phillys. D'un air docte et à voix haute il dit, le regard droit fixé droit devant lui :
- On aura beau dire, de nous deux c'est à Phillys qu'Elsa ressemble le plus.
En toute innocence les enfants répliquent, agitant l'air de leurs piaillement.
- Parce que tu es blonde ? Revenant du Minnesota, elle arbore encore une chevelure décolorée. - Parce que tu es une fille ? - Tu es une princesse ? Demande même la petite Amara.
- Seulement au Kansas, chuchote la hacker à son oreille en aidant la gamine à grimper les marches du bus.
Mais alors qu'avec Bobby ils regagnent les sièges droits et cotonneux du vieil autocar, ils sont conscient que sa ressemblance avec la reine d'Arendelle ne tient à aucun de ces faits. Mais à celui, moins connu, qu'elles aiment toutes deux les femmes.
C'était un vendredi tout ce qu'il y'a de plus normal. Enfin normal tel que définit dans le dictionnaire de Phillys J. Smith, donc plutôt dysfonctionnel tout bien considéré. Elle savait que Bobby ne partirait pas à l'aurore et ils étaient donc tous deux en train de traîner dans l'appart', céréales et café au menu du petit-déj. New-York promettait une belle journée, ensoleillée et somme toute probablement pas bien différente des précédentes. Une sorte de routine s'était installé pour les jeunes mutants. Une veste de Kimono fleurie sur sa nuisette noire, Phillys ajoutait un surplus de crème sur son café à la vanille. Elle avait peu (pas) dormit et se sentait désorientée. Son esprit, d'ordinaire si preste, ressemblait davantage à une locomotive à vapeur qu'à une machine quantique. Étouffant un bâillement, elle fixa un instant son colocataire, dans le sofa du salon, qui semblait également manqué d'énergie. L'air démotivé, Bobby se contenter de zapper mollement, sa tasse de café vide déposant paresseusement une trace d'eau sur la table. Une attitude qui ne lui ressemblait pas. Soucieuse de le voir si apathique, la mutante servit copieusement son colocataire. Avant de se résoudre, laissant le breuvage brûlant à refroidir, à choisir sa tenue de la journée et faire ses bagages. Un regard par la fenêtre suffit à la rassurer. La rue était calme – dans les proportions de la ville qui ne dort jamais s'entend – les passants rétrécit par la distance parallèle à d'industrieuses fourmies multicolores. Rien que de très quotidien. Remplir ses valises pour revenir quelques jours au Kansas ne la ravissait pas. Elle détestait cet aspect binaire de sa personnalité. Cette attitude de Dorothy qui l’étreignait dès qu'elle s'éloignait trop de Smith and Bly Tunwan. D'aussi loin qu'elle se rappelle, on lui répétait qu'elle était faites pour de grandes choses, qu'elle était le Kurt Hummel de Wichita, bien meilleur que tout ce que le Kansas pourrait jamais apporter. Mieux que les fermes poussiéreuses, les conservateurs, le racisme et le passéisme, sûr. Meilleur que les soleils couchants, les chevaux sauvages et les natifs indiens ? Le Kansas comme le reste de l'Univers n'était pas seulement ses merveilles, et Phillys ni pouvait rien. Elle se contenta d'un seul sac et de son ordinateur portable. Avec son appareil photo' c'est bien tout ce qu'elle réussirait à caser -génie de l’ingénierie ou pas- à l'arrière de sa moto. Un petit road-trip ne lui ferait pas du mal au moral. Si elle avait été tout à fait honnête, elle aurait su que le Kansas pouvait se passait d'elle. Mais le retour à New-York, les voyages dans le temps de sa sœur de coeur aka Eilis Archer, la destruction de l'Institut Xavier au sommet desquels trônaient vainqueurs ses affaires avec Bill...Void (Identité secrète ! Like Barry All..The Flash!) étaient autant de facteurs qui la poussait à un nouveau retour aux origines. Le plus simple pour régler ses problèmes aurait été d'en toucher un mot à son meilleur ami. Mais l'électrique mutante ne se sentait pas de faire ainsi souffrir Drake déjà miné par la chaleur de l'été.
Le sac prêt pour son départ de fin de semaine et d'attaque pour la journée, elle sonna la retraite. Direction : cuisine-café-tumblr. Elle pouvait s'accorder une pause dans la rédaction de sa thèse – il y' avait plus de Chaos dans sa vie que dans les fractale d'un flocon de neige donc théoriser était devenu totalement abscons. Sirotant son vanilla coffee – crème et smarties en écoutant du Mary Lambert elle n'entendit pas d'abord son colocataire. Le jeune homme avait apparemment cesser de malmener la télécommande et gardait ses yeux clairs fixés sur l'écran où défilait une chaîne d'informations quelconque.
- Phillys !
La Kansan se retourna, levant un sourcil dubitatif vers le manipulateur de glace, peu désireuse d'interrompre son épisode de Futurama. L'expression indéchiffrable de son ami la convainquit. Avec lenteur (elle manquait de sommeil) et sa nonchalance habituel (elle ne briserai pas son mojo pour des prunes !) la jeune femme retira son casque et gagna le salon. La voix de la présentatrice commença à faire entendre sa douce mélopée.
-« Quoi donc Robert ?
« […] annonce vient juste de nous parvenir, c'est incroyable. Mettons nous en contact avec notre correspondante sur place Gwennifeyr Sals. Miss Sals pouvez-vous nous en apprendre davantage sur la décision qui vient d'être prise ? Vos informations sont-elles sûres ?
« Que se passe t-il donc encore ? Songea Phillys.
Pour tenir Bobby à ce point en haleine c'est que le gouvernement devait trouver une nouvelle idée de génie pour rouler les mutants dans la farine et cela n’annonçait rien de bon.
- 100% fiables Kathy. Lui répondit une charmante journaliste en tailleur marine, je me trouve en ce moment même à la conférence de presse qui se tient à D.C. Les secrétaires du bureau de Washington viennent de nous faire parvenir la nouvelle. Le mariage des couples de même sexe est à présent légal et autorisé dans les 50 états d'Amérique du Nord. Les associations LGBT, Rainbow et les PFLAGs de la ville commencent déjà à organiser des festivités tandis que partout des couples gays et lesbiennes prononcent leurs vœux sans attendre. Kathy nous assistons à un tournant dans l'histoire de notre pays et je crois qu'il est important de souligner que…. »
Déjà les mots de la reporter sont perdus pour Phillys, ils s'élèvent dans l'air et disparaissent, vagues frappant la grève sans rien en changer. Elle a à peine conscience du corps de Bobby contre le sien qui la serre dans ses bras, et tout juste assez d'automatisme pour l'étreindre à son tour.
Sur la table de la cuisine le portable de la mutante sonne en vain. Dans une cuisine rustique au Kansas la nouvelle est parvenue.
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