[Mission] Le Bosquet de Frigga

"Les forêts hallucinées"

Ils n'existent pas de dieux dépourvus de cruautés, et celui qui prône la bonté n'est qu'un hypocrite. - Angrboda

        La géante des glaces excellait à maintenir son calme apparent, dans le but de ne pas laisser sa colère dictée ses actes de manière irréfléchie. Sa respiration contrôlée, elle ne la laissait pas se précipiter quand le singe vert parvint à ébranler leur formation contre tout attente. Un regard significatif en direction du colosse dans l'action et il comprit ce qu'il devait immédiatement entreprendre. Son bouclier prie alors la forme d'une massue de glace qui, dans un mouvement lourd et puissant, chercha à frapper la chose en direction de sa mâchoire pour ainsi le faire valser un peu plus loin dans le jardin. Dès lors que les Jotüns avaient fait face au pantin d’Amora, Angrboda avait senti l’envie du Colosse de se mesurer au Singe Vert. Si ce dernier pouvait contenir ce tas de muscle un moment, cela arrangeait bien évidemment la chamane qui souhaitait pouvoir se concentrer sur celle qui semblait être indéniablement le cerveau du groupe.
       Et pour preuve, la vermine Ase se servir du désordre causé par le singe vert pour contre-attaquer, clairvoyante ou non, il était impossible pour Angrboda de réagir à cette flèche tout en prenant soin de se remettre de l’attaque du géant vert. Ne pouvant que fixer, impuissante, la flèche se diriger vers elle. Pourtant, la chamane finie par se retrouver au sol, alors que l’un des soldats se prit cette flèche d’or à sa place. Sans se soucier de son état, elle ordonna immédiatement aux autres soldats. « Ne lui laissez pas le temps de formuler un autre sort ! » Aussitôt, les trois Jotüns encore en état de combattre, fendirent en direction de la magicienne. La chamane observa le soldat pour tenter de percevoir s’il lui restait encore un souffle de vie. Ce ne fut point le cas, la flèche avait atteint un point vital avec précision malgré que cette dernière ne fût pas forcément destinée au guerrier Jotün qui l'avait sauvé. Il était donc inutile pour Angrboda de gaspiller sa magie en cherchant à le soigner, elle ne possédait pas le pouvoir de ramener les morts à la vie. Elle fixait un instant le colosse et la chose verte d’un côté, puis l’enchanteresse et les trois soldats Jotüns de l’autre.

         À présent, seule, Angrboda concéda à poser le regard sur sa progéniture encore caché dans l’Éther. Son regard aussi bleu que les glaciers de Jotünheim, se teintèrent alors d’une lueur écarlate, un regard propre à son espèce, dont elle ne pouvait qu’être fière. Mais son fils, lui, était-il fier d’être un Jotün ? Une question qui lui traversa l’esprit aussitôt qu’elle vit l’apparence de son fils et la tenue qu'il portait. La haine et la colère qu’elle pouvait potentiellement ressentir à la vue de cette apparence sordide, ne se manifesta guère, cela dit. Car lorsqu’elle vit la condition de Jörmungand, la vision qu’elle eut autrefois quant à l’incertitude de l’avenir du Serpent-Monde lui revient aussitôt… Elle se rappela alors des chaînes d’Odin et d’une essence contenue. Oui. Odin lui avait jeté un sort. Mais quand ? C’était ce que se demandait Angrboda qui avait pourtant averti son fils de la menace qui pesait sur lui bien avant que cette dernière se manifeste ?
       « As-tu l’intention d’imiter ta sœur et d'être témoin de la fin des tiens sans prendre part à aucune bataille, Jörmungand ? » La question avait été posée dans la langue Jotün, tandis que la voix désincarnée de la chamane, portée par un vent surnaturel, pouvait être entendue avec clarté dans l’éther.

"Les forêts hallucinées"

Ils n'existent pas de dieux dépourvus de cruautés, et celui qui prône la bonté n'est qu'un hypocrite. - Angrboda

       Elle sentit son cœur se serrer dans sa poitrine lorsqu’elle vit son fils choisir d’aller vers cette femme, Ô combien représentative de ce qu’était les Ases par nature et dont Loki avait hérité la corruption. Ses yeux revinrent à son bleu de glace, acceptant cette réalité sans plus de cérémonie. Si elle pouvait mépriser Hela et n’accorder aucun crédit à Jörmungand, maintenant, c’était deux de ses enfants qu’elle allait haïr et ne plus vouloir avoir affaire. Cette chose devant elle ne semblait n’avoir plus rien du serpent-monde qu’elle avait jadis donné vie. Il était sensé être celui craint de tous et qu’aucun Jotun n’oserait offenser et pourtant, à l’heure actuelle sous le regard froid de sa mère, il n’était rien d’autre qu’un simple obstacle pour quelques soldats. Les événements continuaient à ne pas tourner en la faveur de la Chaman qui perdit son commandant. L’enchanteresse avait alors profité de la situation pour égorger rapidement celui qui s’était retrouvé bloqué sous le poids du colosse de glace.

Ceux-ci avant de se téléporter auprès de l’ancien serpent-monde, fragilisé par son humanité aberrante. Cette fragilité dont Amora avait choisi d’utiliser contre la mère des monstres. Et aussi fort qu'elle pouvait haïr ce bon à rien qui avait osé la trahir pour celle qui était prête à l’égorger, Angrboda ne pouvait guère luter contre cette faiblesse maternelle qui ressurgissait en elle à cet instant pour cet ingrat. « Tu m’auras déçue jusqu’à la toute fin. » Lui adressa-t-elle ces mots alors qu'elle jetait son arc au sol, devant sa soumission évidente, les deux autres soldats survivants avaient à leur tour choisi de jeter leurs armes de glace au sol. Sans doute que l’enchanteresse pouvait bluffer en cet instant, sans doute qu'Angrboda aurait pu le voir à l’aide de son don. Seulement, c’était son fils qui se trouvait être sous la menace d’une lame et elle refusait de jouer son avenir sur un simple parie, ou une intuition. Tout simplement car elle reconnaissait en Amora, ce qui était propre au dieu de la fourberie et en cela, elle la croyait bien capable de mettre à exécution sa menace.  

Son regard quittait alors l’enchanteresse et son fils pour se posait sur le jardin, remarquant alors enfin cette étrange sensation face à l’agitation qui venait de s’emparer des lieux. Nul besoin de faire preuve de magie, pour constater que de toute façon pour l’enchanteresse que les Jotuns n’allaient sans doute ne plus être la seule menace ici. Cet endroit était déjà dangereux à l’origine, il semblait le devenir un peu plus chacun instant que ce dernier s'assombrissait.