Petite visite nocturne [pv: Rosanna]

Là en revanche, ça pouvait poser problème. Il disait ne pas suivre les codes de conduite donné par les autres alors est-ce qu’elle devait en comprendre qu’il se fichait des lois et préférait faire comme bon lui semble ou bien cela dépendait des circonstances ? C’est vrai que c’est parfois tentant de faire comme on veut mais le désordre n’était pas quelque chose qu’elle cautionnait. Rosanna n’approuvait pas trop cette pensée mais ne pouvait rien en dire pour le coup. La conclusion en revanche était plutôt troublante et cette fois-ci, elle ne savait pas trop comment elle devait l’interpréter. Vraiment pas du tout. Elle lui avait dit qu’il ne serait pas très professionnel s’il lui faisait des avances et … il continuait de jouer donc. Elle ne s’attendait tellement pas à cette réponse qu’elle n’avait pas tout de suite saisi l’ambiguïté des mots. Quand ce fut le cas, elle eu un petit rictus. C’était le fait de mélanger les deux conversations qui l’avait un peu déroutée. Il était très malin en fin de compte et un peu trop joueur du coup. Contrairement à lui, elle avait beau être joueuse, elle était une travailleuse avant tout. Les bras chargés, elle était revenue en tentant tant bien que mal de répondre à ses propos.

- Vous faites à votre manière et C’est pour cette raison que vous êtes mon patron puisque vous ne vous pliez pas aux règles des autres. C’est vrai que vous me décevez beaucoup en me disant cela, je suis perturbée par cette nouvelle.

Elle avait dit cela de façon très théâtrale, histoire de ne laisser aucun doute sur le manque de sérieux de ce qu’elle venait de dire. Tout cela était bourré d’ironie puisqu’évidemment, elle n’était pas vraiment déçue bien qu’elle était forcée de reconnaître que ce point de vue divergent n’était pas un point positif à son goût. Si ça ne consistait qu’en sa façon actuelle de se comporter, ce n’était cependant pas un problème : elle pouvait gérer. Elle avait ramené divers desserts car elle savait que la cuisine un peu originale de Kendra en matière de dessert pouvait surprendre et déplaire à beaucoup de monde mais il avait voulu tenter l’expérience alors s’il ne lui avait pas poser la question elle l’aurait laissé mordre dans la pâtisserie mais il était prudent. Elle lui répondit donc sur la composition peu orthodoxe des gâteaux et à ce qu’elle voyait, cela ne sembla pas le convaincre aussitôt d’en manger un morceau. Intérieurement, elle était pliée de rire. Oui elle se moquait de son hésitation mais elle trouvait juste cela terriblement amusant quand il n’avait pas toujours le dessus de la situation. Elle se demanda si il allait grimacer, elle espérait juste qu’il ne trouverait pas cela non plus trop spécial à son goût. Elle se souvenait encore de la première fois que la gamine avait fait le repas quand elles s’étaient trouvé toutes deux à vivre ensemble. Elle n’avait pas l’habitude à tel point qu’elle avait fini par commander des pizzas mais comme elle ne savait pas cuisiner…. Ou du moins il valait mieux qu’elle évite les fourneaux… elle avait du s’y accoutumer. Et finalement c’était bon mais ça surprenait. Elle regarda attentivement son chef goûter et il avait l’air en pleine réflexion alors elle rit doucement. Il lui tendit le cupcake et elle l’observa en le questionnant du regard. Il n’aimait pas alors il le lui donnait ? Non en fait il voulait juste savoir à quoi était le cake et elle récupéra donc celui-ci entre ses doigts. Il avait mordu dedans et sa mère aurait trouvé cela très peu hygiénique de manger quelque chose que quelqu’un a déjà touché mais son éducation n’avait pas de pareilles empreintes sur la jeune femme. Adolescente, elle finissait discrètement les assiettes de ses petits cousins pour qu’ils ne se fassent pas rouspéter. Et puis elle avait beau paraître distante par moment, elle n’aimait pas dire non de façon catégorique. Elle mordit donc dans la pâtisserie sans plus chercher. Elle comprenait pourquoi il n’avait pas trouvé, ce n’était pas simple quand on n’avait pas l’habitude des mélanges pareils. Elle sourit délicatement.

- Je suis déjà rassurée que cela ne vous déplaise pas. Vous avez parfaitement raison, c’est bien du fromage : de l’emmenthal je crois et de la pomme. Je pense que vous connaissez, non ?

Elle prit un verre d’eau pour atténuer le goût du fromage parce que ce n’était pas forcément ce qu’il y a de plus agréable à garder en bouche et but une gorgée tranquillement. En plus, les cakes donnent soif souvent. Elle le regarda et lui tendit son gâteau pour voir comment il allait réagir et pour savoir s’il n’avait pas un peu menti sur le fait qu’il trouve ça bon. Elle le fixait, c’était un peu un défi.

- Est-ce que vous voulez tester celui-ci ?

Et puis soudain elle tourna la tête vers la cuisine et remarqua l’horloge et donc l’heure. Elle se rendit compte que le temps avait passé vite et elle fronça les sourcils. Comment… elle ouvrit la bouche et se tourna de nouveau vers lui.

- Monsieur ? Comment comptez-vous faire pour le couvre-feu de ce soir, pour rentrer ?

En effet, elle n’en savait rien mais tout le monde avait une barrière qu’il ne pouvait pas franchir, plus ou moins basses en fonction des personnes. Certains être vraiment limités par leur bon sens moral, d’autres aux contraires se sentaient galvanisés par ces frontières interdites mais dans tous les cas ils avaient une limite. Certains ne peuvent pas faire de mal aux animaux, certains ne peuvent pas boire d’alcool, d’autres refuseront d’embrasser une personne du même sexe, d’autres encore ne pourront pas franchir un tunnel sombre ou rempli d’araignées. Quelqu’un qui ne possèderais aucune limite ne serait pas… normal ? Mais dans la situation actuelle, sur ce terrain là, elle ne savait effectivement pas si lui avait des limites. Impossible de deviner ce genre de choses sur lui, il ne trahissait même plus de gêne quelconque alors elle se mordit la langue : oui… si lui n’avait pas de bornes ? Cela la déstabilisa un peu, elle devait bien se l’avouer et du coup, elle ne faisait même plus attention à ce qu’elle faisait. En temps normal, elle pouvait se révéler gaffeuse sur certaines choses et un peu tête en l’air quand elle pensait à quelque chose. Sauf qu’en général Kendra était derrière et veillait, mine de rien, a lui éviter les ennuis. Elle avait beau avoir été élevée en faisant attention, elle était vraiment… à côté de la plaque. Rosanna regardait son invité avec interrogation, hésitant sur ce qu’elle devrait répondre. Elle se contenta de lui dire :

- Vous voudriez me faire croire que vous n’avez aucune limites ? En êtes-vous sûr ?

Elle avait fait une petite erreur et elle ne s’en rendit pas compte tout de suite. Pas même quand ils commencèrent à discuter de pâtisserie et de quel goût pouvait bien avoir ce cupcake. Elle ne s’aperçut pas tout de suite que sa peau avait rougi au niveau des bras et la pensée qui aurait du être immédiate ne fit pas du tout surface. A croire que la présence de cet homme lui faisait oublier toute précaution au point de ne plus se souvenir qu’elle est allergique… au lactose ! Des gâteaux… du fromage… Heureusement qu’elle n’était pas fortement atteinte comme pouvait l’être certains mais elle avait simplement rendu le gâteau en répondant à son patron, s’était négligemment gratté le bras puis lui avait tendu le sien en attendant de voir sa réaction. Le « compliment » lui était totalement passé au dessus de la tête, parce que ce n’était pas le genre de détail insignifiant qui éveillait des réponses en elle. Il avait à peine prit le cake qu’elle ressentit finalement de violentes démangeaisons dans le bas et décrocha son regard de lui. De toute façon, elle avait bien compris qu’il la provoquait carrément en l’observant ainsi quand il mordait dans cette pâtisserie. Très doué, très déstabilisant. Néanmoins, elle le laissa seul à la table parce que si elle n’agissait pas maintenant elle devrait aller à l’hôpital. Elle se dirigea rapidement vers la salle de bains sans prendre le temps de lui dire un mot, n’ayant pas réagi assez vite. Elle ouvrit l’armoire à pharmacie et sortit la seringue d’épinéphrine qu’elle s’injecta aussitôt. Normalement, elle devrait ensuite suivre un traitement et vérifier que l’allergie se résorbait. Sinon direction les urgences. Elle revint dans le salon. Il avait parlé de Kendra, elle décida de reprendre la conversation comme-ci tout ceci n’avait pas eu lieu et évitait de toucher ses bras.

- Navrée… Oui Kendra est douée dans beaucoup de domaines. Je suppose que ce ne serait pas une bonne chose que je vous laisse l’approcher mais si vous voulez elle sera ravie de vous faire des gâteaux.

Elle lui sourit doucement avec un brin de malice. Oh s’il continuait, elle lui collerait réellement Kendra dans les jambes mais elle était quasiment sûre que sa jeune sœur l’agacerait très vite alors elle n’avait pas trop envie que celle-ci crée des ennuis. Elle avait relevé les yeux en se demandant ce que la jeune femme devait être en train de faire puis préféra ne pas y penser finalement. Pitié faites qu’elle soit réellement chez une amie… Enfin, Rose ne pouvait pas y faire grand-chose et tout cela lui fit penser qu’il était « tard » désormais. Comment son invité allait-il pouvoir sortir sans encombre ? Elle ne pu se retenir de lui poser la question et attendit une réponse les sourcils froncés et fut consternée qu’il prenne les choses si légèrement. S’il comptait la gêné avec ses propos c’était raté parce qu’elle était vraiment soucieuse désormais mais elle ne voulait pas non plus tendre l’atmosphère alors elle se leva lentement et alla faire chauffer de l’eau sans lui demander son avis, qu’il veuille un thé ou non. Elle en profita pour jeter un coup d’œil dans la rue et soupira avant de se tourner vers lui.

- Allons bon… monsieur vous êtes incorrigible ! dit-elle en riant légèrement avant de redevenir sérieuse. Honnêtement… je préfèrerais que vous ne ressortiez pas ce soir…

Elle le laissa prendre un autre cupcake et finit par ramener des tasses. Il marmonna une sorte de déception et elle fit mine de ne pas avoir entendu. Elle était plutôt en train de réfléchir à ce qu’elle avait dit précédemment.

Et il continuait sur cette voie, à prétendre n’avoir aucune limite. M’enfin ce n’était pas humain, bordel ! Quant à essayer de trouver cette fameuse limite, elle préférait ne pas tenter l’expérience : ça reviendrait forcément à pousser parfois sa curiosité et elle n’avait pas trop envie de se mêler de ce qui ne la regardait pas. Rosanna sourit donc avec un léger amusement mais elle n’eut pas trop le temps de lui répondre qu’elle s’était éclipsée dans sa salle de bains sans plus dire un mot, sans rire. La situation pourrait devenir importante si elle n’y prêtait pas attention alors elle avait utilisé la piqûre qu’elle avait dans sa pharmacie en cas d’urgence… ou dans le cas présent, en cas d’inattention. Ce qui arrivait bien plus souvent qu’on ne peut le croire avec Rosa : la preuve, c’était totalement inconscient de la laisser avec une lame en main ou plus simplement, dans une cuisine. Sur le moment, elle ne pensa pas vraiment à ce que devait se dire son patron mais c’était trop urgent pour qu’elle réagisse autrement et il comprendrait parfaitement. A moins qu’il ne préfère devoir l’emmener à l’hôpital quand elle aurait commencé à suffoquer, ce dont elle doutait fortement. Elle revint donc tranquillement en se rassurant sur l’ampleur des dégâts et constata qu’il n’était plus assis à la table. Elle se demanda où il était passé mais allait retourner se poser à table quand il lui fit signe et qu’elle le vit derrière elle. Elle le regarda avec étonnement quand il lui tendit un verre rempli d’un liquide rouge qu’elle observa avec une grande insistance. Elle se questionnait sur la contenance du verre mais elle sentit une odeur qui lui était légèrement familière. Mais comment diable ce breuvage pourrait-il servir vis-à-vis de son allergie ? Elle était plutôt sceptique et se demandait vraiment d’où il pouvait sortir ce genre de connaissances. Ne parlons même pas du fait qu’il s’excuse pour ne pas avoir réagi avant en sachant qu’elle était allergique : ben il n’était pas sa nounou, il n’avait pas à faire attention. Elle était censée être suffisamment grande pour ne pas manquer de se tuer toute seule. Elle était un peu inconsciente sur les bords, voilà tout. Elle se sentit un peu embêtée d’avoir été pire que tête en l’air.

- Qu’est-ce que c’est ? Je n’ai jamais bu de truc dans le genre quand je faisais des allergies avant… Vous n’avez pas à vous excuser puisque c’est à moi de faire attention à ce que je fais.

Elle lui tendit sans hésiter le bras où les rougeurs étaient violemment apparues et continua de discuter comme si de rien n’était. Qu’est-ce qu’il pouvait bien faire de toute façon ? Elle se rappela le verre et finalement le bu. Elle avait suffisamment confiance pour ne pas suspecter que ce verre puisse la tuer. De nos jours, il y a tellement de choses dangereuses de toute façon : un simple cupcake ! Bref, elle le sentit masser son bras et craignit qu’il rende les plaques rouges encore plus abrasives mais elle ne dit rien quand elle constata que ce n’était pas le cas. Pourtant le contact aurait du la démanger, brûler mais au contraire. Elle plissa le front, ne comprenant pas vraiment comment il se débrouillait. Quand elle récupéra son bras, elle était encore un peu surprise par tout cela et cligna des yeux avant de retourner s’asseoir et de s’occuper du thé. Par moment, elle le fixa curieusement puis regarda sa tasse : c’était tellement étrange tout ça mais quand elle évoqua le fait qu’il ne devrait pas sortir cette nuit alors son rire lui remit les idées en place. Elle redressa la tête : en quoi était-ce risible ? Elle s’inquiétait, c’était normal non ? Et naturel parfois aussi. C’était un peu plus fréquent comme réaction depuis qu’elle s’occupait de sa sœur même si cette dernière se passait bien de sa protection et ses conseils. Ça lui semblait également évidemment de ne pas le mettre à la porte de chez elle comme ça sans se soucier de savoir s’il n’avait pas eu d’ennuis sur le chemin du retour. Elle pouvait donc lui proposer de dormir ici, en revanche, elle n’avait pas dit qu’elle dormirait avec lui mais monsieur cherchait encore et toujours la petite bête. Elle lui sourit paisiblement.

- Non, c’est naturel mais ne vous en faites pas je vous laisse le lit et toute la couette pour vous. Je ne voudrais pas que vous vous sentiez mal reçu en ayant qu’une moitié de couette ! Répliqua-t-elle avec un sourire malicieux.

Elle se sentait un peu mieux que tout à l’heure et constata avec étonnement que toutes les sensations liés à son allergie n’étaient bientôt plus que souvenirs, ce qui était impressionnant. Elle fit infuser son thé et regarda les arômes s’étaler dans le fond de sa tasse.

Il avait souri mais il ne lui avait pas expliqué ce qu’il avait mis dans le verre. Dans un sens, ce n’était pas très rassurant mais bon il n’était pas toujours très bavard sur certains sujets et dans ces cas là inutile d’insister. De toute façon, elle n’aimait pas forcer les gens à lui parler s’ils ne le voulaient enfin sauf quand c’était le but d’une manœuvre justement. Or ce n’était pas le cas, elle était juste déroutée par la couleur du liquide et vraiment perplexe parfois cet homme était déroutant. Ce n’était pas très commun et n’ajoutons rien au terme de « magie » qui ne lui fit pas le meilleur effet mais elle n’allait pas relever ce détail. Ce serait chercher la petite bête et elle n’avait pas envie de s’attarder sur des bagatelles. Déjà qu’elle laissait rarement les autres s’occuper d’elle excepté les médecins quand c’était important, il était assez étrange qu’elle ne refuse pas de lui montrer son bras en prétextant que ce n’était rien. Elle n’avait pourtant rien dit : à croire qu’elle confondait le fait d’obtempérer quand il s’agit du travail et ce qu’il venait de se passer. En plus, en effet, c’était censé être elle qui s’occupe de tout mais ce n’était pas du tout le cas. Bon … un invité d’honneur… le terme n’était pas exact puisqu’il n’y avait que lui de présent donc pas de « guest star » mais cela l’amusa un peu. Généralement ce sont les enfants que l’on chouchoute, pas un grand garçon comme lui : ce sont les grands-mères et les mères qui utilisent souvent ces termes pour parler des petits-enfants, des enfants. Rosa haussa un sourcil. Quoi qu’il en soit, elle n’était pas très douée pour prendre soin de ses invités comme il pouvait le constater. Elle haussa donc les épaules quand elle lui répondit.

- Ce n’est pas faux mais vous êtes terriblement mal tombé dans ce cas monsieur. Je fais une pitoyable hôtesse : je ne fais pas la cuisine, je suis étourdie… vous auriez du rendre visite à quelqu’un d’autre de plus compétent pour ça.

Rosanna avait sagement bu son verre, elle trouvait cela bizarre mais avec le thé ça irait mieux et puis elle attrapa une pomme entre ses doigts et mordit dedans. Là elle ne risquait pas l’allergie, c’était certain. Elle constata qu’il avait repris le même thé qu’auparavant et c’était bien le seul qui était capable de le boire. Du coup, le paquet était presque neuf depuis qu’elle l’avait et elle ne savait absolument pas quoi en faire alors. Elle préférait les saveurs fruitées ou bien les classiques. Ce fut un peu comme un moment de pause dans le repas et il n’avait pas ajouté grand-chose à ses propos alors elle sourit gentiment, infusant tranquillement son thé. Elle jeta un coup d’œil à son bras, qui se portait correctement finalement et lui proposant un yaourt, elle alla ranger les laitages histoire de ne pas les laisser trop longtemps hors du frigo. Elle revint ensuite à sa place.

- Si vous aimez tant ce thé vous pouvez l’emportez. Personne d’autres ne le boit.

Il valait mieux qu’il serve à quelqu’un plutôt que de rester dans un placard éternellement. Quant à cette histoire de lit, apparemment, il ne comptait pas lui laisser le dernier mot pour l’instant. Peut-être était-ce un peu de sa faute puisqu’elle avait répondu avec plaisanterie et qu’il avait réagi à cela. Elle ne pouvait pas prétendre qu’il ne l’amusait pas puisqu’il avait de la répartie et puis elle avait toujours été joueuse et c’était difficile de ne pas réagir quand il la provoquait. Aussi il l’a fit beaucoup rire quand il prétendit qu’ils pourraient attraper froid en dormant seuls. Ben voyons… elle le saurait depuis le temps, si elle risquait de tomber malade pour une raison pareille surtout qu’il ne faisait pas encore très froid en ce moment aux Etats-Unis. Encore moins dans un appartement bien isolé. Oh pauvre chou, il a peur de se sentir perdu dans un grand lit qui ne lui appartient pas. Oh et en plus, il jouait bien la comédie. On aurait dit… vous savez là … « le chat potté » ! Je suis sûre que vous connaissez. Bon à la différence que le fameux chat du dessin animé n’était pas du tout semblable pour le reste du caractère. Elle se montra donc faussement attendrie :

- Oh pauvre de vous, vous avez raison, je vous donnerais une couverture en plus puisque vous êtes si frileux ! Ne vous en faites pas, Kendra a de jolis peluches qui peuvent vous tenir compagnie, vous serez bien entouré… C’est ma façon de prendre soin de vous !

Pas un instant, elle n’avait envisagé les choses sous cet angle puisqu’elle n’était pas dans le même cas que lui. Elle n’avait pas pensé que porter le nom qu’il possède pouvait être difficile parfois. Les gens vous voient au travers de vos parents, c’est vrai, et certains ne vont pas chercher plus loin pour faire la différence entre les deux. Elle pouvait l’envisager puisqu’enfant, elle n’appréciait pas qu’on dise « oh t’as vu c’est la fille des Livingstone, … ». Elle avait un prénom et n’était pas ses parents. A son échelle à lui, c’était encore pire. Rosanna connaissait légèrement son père et peu importe l’avis qu’elle pouvait bien avoir à son sujet, elle faisait parfaitement la distinction entre lui et son fils. Bien entendu qu’elle se comporterait de façon normale autant que possible, vu qu’elle ne cherchait pas à se servir de lui. Cela fait de la peine de n’être qu’un intermédiaire pour autrui et le fait qu’il lui dise ça la mettait brièvement mal à l’aise. Elle finit par passer une main dans sa chevelure tandis qu’un sourire gêné se dessinait au coin de ses lèvres : elle préféra donc juste prendre en compte le fait qu’elle n’était pas une si mauvaise hôte finalement si elle comprenait bien. Elle acquiesça et remua sa cuillère dans sa tasse de thé pour mélanger l’eau avec le liquide infusé.

- Vous avez raison, je n’avais pas pensé à cela mais ce n’est pas très valorisant ce genre de fausse compagnie.

Elle souffla un peu sur son thé et préféra changer effectivement de sujet en parlant du thé qu’il avait choisi. Il avait l’air un peu dubitatif, sans doute sur la raison de son offre mais elle ne s’offusqua pas du fait qu’il la décline. Elle aurait pu faire mine d’être blessée par ce refus mais elle n’avait pas l’envie de pousser le jeu jusque là. Elle sourit gentiment : il avait trouvé la bonne excuse pour ne pas accepter. Effectivement, il pourrait revenir boire un thé quand il le voudra, elle lui ouvrirait la porte avec plaisir mais bon… ils se voyaient déjà lors du travail, il n’allait pas venir juste pour boire un thé de Noël tout de même. Il lui en faudrait des visites pour qu’il écoule le stock ! Et puis s’il comptait repasser, il rencontrerait sans doute Kendra qui ne manquerait pas de constater qu’elle l’avait déjà croisé une fois. Elle avait une bonne mémoire des visages masculins… Pas sûr que Rose arrive à supporter sa cadette par la suite. Enfin on verrait bien ce que ça donne s’il passe sonner à la porte un jour où la jeune femme est là. Elle regarda sur son téléphone, elle avait un sms justement et prit le temps de le lire mais contrairement à cette pointe au cœur d’inquiétude soudaine qui se manifesta, le message était ridiculement inintéressant. Rien de grave en tout cas et elle leva inconsciemment les yeux au ciel. Elle répondit de façon courte et expéditive par un simple non et retourna à sa tasse de thé et son invité qui ne semblait pas être très enchanté par l’idée des peluches colorées qu’elle lui proposait en compagnie pour la nuit. Elle en rit doucement : c’est sûr qu’entre un nounours et une vraie personne, elle aussi préférait la seconde option. Enfin pour ce qui est d’être rassuré, elle supposa qu’il jouait sur le fait qu’il disait qu’il serait perdu.

- ah bon ? J’aurais pourtant cru que c’était votre point faible.

Elle but un coup, puis releva son regard et constata qu’il l’observait avec le sourire, sous couvert de sa boisson… Elle fit mine de ne pas répondre sur le moment. Bon le souci c’était qu’ici la seule présence féminine c’était elle donc elle ne pouvait pas rebondir à ce propos. Il fallait bien avouer que pour le coup, la répartie ne lui venait pas et ça, ça l’embêtait un peu. Ce n’était pas drôle et elle ne pouvait pas lui laisser l’avantage si aisément. Sauf qu’elle avait beau chercher rien ne lui venait à l’esprit.

- … et en quoi est-ce plus rassurant ? Au moins la peluche ne prend pas toute la place dans le lit...

Elle finit sa pomme et sa tasse de thé puis se leva pour débarrasser un peu la table. Elle était en train de réfléchir au fait que s’il dormait ici, ça allait être un peu compliqué le lendemain pour le travail. Il vaudrait mieux qu’elle se lève avant lui pour qu’il puisse sortir de la maison parce qu’elle ne laissait pas la porte ouverte bien entendu. Elle dormirait sans doute sur le canapé alors. Elle ne pouvait pas squatter la chambre de sa petite sœur qui s’en rendrait compte et le prendrait sans doute assez mal.